Il y a chance que nos gouvernants soient obligés d'user
largement de mensonges et de tromperie pour le bien des gouvernés; et nous
avons dit quelque part que de pareilles pratiques étaient utiles sous forme de
remèdes.
Platon
– La République 459d
C'est donc aux gouvernants de l'État qu'il appartient, comme
à personne au monde, de recourir à la fausseté, en vue de tromper, soit les
ennemis, soit leurs concitoyens, dans l'intérêt de l'État ; toucher à pareille
matière ne doit appartenir à personne d'autre.(…)
Platon
– Idem
Quel cynisme ! Platon aurait donc anticipé d’un
millénaire Machiavel ? Nos politiciens magouilleurs pourraient-ils nous
dire : « Ne nous insultez pas ! Si nous vous avons menti, c’est
dans l’intérêt supérieur de l’Etat – c’est-à-dire de vous, et nous n’avons fait que suivre le précepte Platon – Platon dont
par ailleurs tout le monde se réclame »
Dans le même temps, retrouvons (ici) les passages où saint
Augustin condamne le mensonge, quelque soit le projet qui le justifie,
considérant que la bonne foi est l'unique base sur la quelle peuvent s’édifier
des rapports humains authentique.
Du coup on se doute que Platon ne parle pas du tout de la
même chose : comparant les citoyens à des petits enfants malades qui
rechignent à prendre leur remède, il justifie le mensonge comme faisant partie
du traitement. De même que le médecin met du miel sur le bord de la coupe
contenant le médicament que le malade va boire sans soupçonner son
amertume, le mensonge n’est qu’un moyen de faire accepter les mesures que
le chef de l’Etat doit prendre dans l’intérêt du pays. Donc le mensonge doit
disparaître, être oublié, dès lors que les réformes ont été acceptées, que ce
soit l’augmentation des taxes ou des impôts, ou les lois d’exception liberticides.
--> Le mensonge serait donc justifié à la condition qu’il
soit le fait des gouvernants qui agissent dans l’intérêt de l’Etat et non dans
leur intérêt particulier. Quand aux citoyens qui s’offusquent des mensonges de
leurs gouvernants, qu’ils se regardent un peu dans la glace et qu’ils se disent
« je ne suis qu’un enfant irresponsable, et c’est pour cela qu’il a été
juste de me mentir. La seule question qui importe, compte tenu de ce que nos
dirigeants nous ont fait accepter, c’est : « est-ce que ça va mieux
maintenant ? »
Pourquoi pas ? Sauf que le mensonge, s’il ne jette pas
le discrédit sur les ministres et chefs d’Etats, humilie ceux qui ont été
trompés : « On vous a menti ? Mais est-ce que vous méritiez
autre chose ? Le jour où vous serez capables de vouloir autre chose que
votre petit intérêt particulier, oui : ce jour-là on ne vous mentira
plus ! »
- Une exception : durant la campagne électorale de
2012, j’ai eu le sentiment que les électeurs savaient très bien que les
candidats à la Présidentielle leur mentaient (y compris
« Moi-Président ») Ils le savaient mais ils aiment ces mensonges,
c’était comme une gentille berceuse : il sont voté pour celui qui chantait
le mieux.
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