Rien de grand ne s'est accompli dans le monde sans passion.
Hegel - Introduction à la Philosophie de l'Histoire
Explication : Hegel oppose ici la sphère subjective de la passion à l’histoire entendue comme destin de l’humanité.
Traduction : La passion est la force du désir qui pousse les individus à l’action, à la « grande » action, celle qui nécessite des efforts surhumains, celle qui met même la vie en danger.
L’histoire est le devenir de l’humanité, tel un destin qui se révèlerait progressivement aux yeux des hommes (le philosophe hégélien aurait néanmoins le privilège de l’englober dans une vue générale).
Autrement dit, les hommes agissent par passion en poursuivant leur appétit de jouissance ; mais l’effet de cette action se retrouve dans le domaine de l’histoire bien au-dessus des individus, et ignoré d’eux.
Exemple : les soldats qui par héroïsme permettent la victoire de leur armée, le font par passion guerrière (soif de gloire, haine, désir de revanche, etc.), mais c’est l’histoire de leur pays qui en est transformée.
Application : Tout cela est assez banal. Par contre on pourrait en tirer parti pour renouveler la vision de nos hommes politiques, en cette période de surchauffe électorale.
On demande « Qu’est-ce qui fait courir nos hommes politiques ? L’amour du pouvoir ? La recherche désintéressée du bien public ? » Vous entendez un de nos candidat qui dit : « Vous pensez bien que si on n’est pas sincère en politique, si on se battait pour des idées en les quelles on ne croit pas, on ne pourrait pas les faire triompher » Et un autre qui dit : « Untel, il est allé apporter son soutien à X***, parce qu’il avait de meilleurs sondages que moi ». Comment interpréter ?
Hegel nous dit : interprétez comme vous voulez : ça ne change rien, parce que dans le domaine politique, ça revient au même. Chacun de nous ne vit jamais que dans la sphère de la subjectivité, personne ne peut dépasser sa propre individualité, ni sa propre époque. Que je veuille le bien de mon pays ou mon bien propre, ça change certes quand à l’attitude morale ; mais ça ne change rien du point de vue du résultat dans l’histoire. Les pires tyrans, les plus cruels et les plus cupides peuvent avoir laissé dans l’histoire une trace exceptionnelle - Alexandre est connu pour avoir massacré 8000 personnes lors de la prise de Tyr - Mais des rois peuvent avoir eu une attitude morale admirable et avoir ruiné leurs peuple malgré tout.
Conclusion : Alors quoi ? Les grands hommes ils n’existent pas ? De Gaulle, comment il savait que la France n’avait pas perdu la guerre ? (cf. message 18 juin 2006). Alors oui, ils existent mais leur capacité à incarner leur époque ne leur donne qu’une vision historique… du présent. Mais l’avenir n’est pas l’objet de science.
Il n’y a que le philosophe hégélien pour se croire capable d’une telle science : c’est pour ça qu’il ne faut surtout pas lui donner le pouvoir.(1)
(1) Oui, ça marche pour les marxistes aussi.
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