Y penser toujours. N’en parler jamais.
Maxime
d’Etat
Cette maxime qui est sans doute aussi
ancienne que la politique a été évoquée à propos de la candidature à la
Présidentielle de 2007, lorsque Nicolas Sarkozy a avoué, longtemps avant
d’avoir manifesté officiellement sa candidature, qu’il y pensait et pas
seulement en se rasant le matin (reprenant les termes de la question qui lui
était alors posée).
Mais on ne doit pas oublier qu’il s’agit
d’une maxime générale en politique : c’est la maxime du secret. La politique implique autant de savoir se
taire que de savoir parler (« communiquer »). Le talent politique consistant
en l’occurrence à savoir 1 – Ce
qu’on peut révéler, 2 – Ce qu’il
faut taire, et 3 – Ce qu’il faut
dire quand on se tait.
???
On ne me comprend pas ? Je veux dire
bien sûr que l’art du secret implique
celui du mensonge. Suivez un peu SVP.
Car aujourd’hui, on ne peut se contenter du
mutisme. Les secrets d’Etat risqueraient de transparaitre dans le blanc d’un
silence : on ne peut dire aux citoyens : « Circulez, il n’y a
rien à voir ». Seules quelques dictatures bien staliniennes pourraient
encore s’y risquer, mais ce serait à leur détriment.
Il faut répondre aux journalistes, dire
quelque chose, même si ce sont de ridicules « éléments de langage »
(1) - faute de mieux, c’est ça qu’on dira.
Bon : tout ça est connu depuis
longtemps et on a même utilisé pour en parler de l’expression langue de bois.
Qu’est-ce qu’on peut encore dire de plus ?
J’ai parlé de l’art du mensonge, entendant par-là l’art de la dissimulation : ne pas se faire repérer. Savoir
cacher ce qu’on ne dit pas, même quand tout le monde devine ce que c’est ;
éviter de se taire car c’est un aveu ; mais utiliser les éléments de
langage en est un autre.
Le véritable homme politique, celui qui a
le talent nécessaire pour réussir dans cette carrière est celui qui vous ment
sans éveiller votre méfiance. (2)
Le mensonge porté à ce degré de perfection
parait véritablement inaccessible – sauf à obtenir la complicité des citoyens,
lorsqu’ils souhaitent entendre ce qui leur fait plaisir, quand un pieux
mensonge vaut mieux que la triste vérité.
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(1) Définition des « éléments de
langage » : En politique ou en
communication, l'expression "éléments de langage" désigne un
argumentaire sur un sujet donné, préparé à l'avance, et répété par les membres
d'un groupe politique ou les chargés de communication. Ils permettent de
s'assurer de la cohérence des discours en invitant les différents intervenants
dans les médias à utiliser des éléments d'analyse, des idées, à citer des
mots-clés ou à placer des "petites phrases" pour illustrer leurs
propos.
Synonymes
: réponses toutes faites, questions-réponses, prêt-à-penser, fiches.
(A lire ici)
(2) Je sais que certains de mes lecteurs
vont s’insurger : il doit bien arriver que nos politiciens nous disent la
vérité – quand même ! Je répondrai : oui, sans doute. Mais il ne
s’agit de politiciens – et donc pas seulement de gestionnaires ou de moralistes
– que si cette sincérité est évaluée à l’aune de la conservation du pouvoir.
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