Si on ne s'aimait pas tant soi-même on serait toujours
seul.
Boris Vian – L'Herbe
rouge
Prenez mes dollars, mes bank-notes, /Ma montre, mon chapeau, mes bottes, / Mais dites-moi que vous m'aimez !
Offenbach – La vie parisienne – Rondo du brésilien
On commence à avoir des malheurs quand on a cessé de ne
penser qu'à soi.
Boris Vian
1 – Le narcissisme serait un amour de soi qui culmine
dans la jouissance de l’amour venu des autres. Dites-moi que vous m’aimez… C’est ce que chante le Brésilien dans
le Rondo de la Vie parisienne, – un
homme qui ne pense qu’à lui, et qui s’entoure d’entremetteurs et de
cocottes : telle serait la complainte de l’amoureux de lui-même.
On est quand même un peu étonné – Comment celui
qui s’aime lui-même aurait-il besoin des autres ? Il n’en a semble-t-il
pas besoin, puisqu’il est à la fois sujet et objet du même amour.
– Mais rappelons-nous le mythe : Narcisse est mort
de chagrin faute d’avoir pu étreindre son reflet dans l’eau de la fontaine. Comment
satisfaire un pareil amour ?
Puisqu’il ne suffit pas d’être adorable, mais qu’il faut
en plus être adoré effectivement, c’est à dire en actes, et faute de pouvoir
s’enlacer soi-même, la parade consiste à se faire étreindre par autrui. Un
« autrui » qui ne vivrait, ne respirerait, que par nous – qui
n’espérerait rien de la vie que de pouvoir rester à nos pieds.
2 – Toutefois, en ayant besoin d’autrui, on se met sous
sa dépendance. L’amour, même s’il n’est pas amour pour les autres, a besoin d’eux
malgré tout. Et avoir besoin des autres, c’est vivre dangereusement. On commence à avoir des malheurs quand on a
cessé de ne penser qu'à soi.
3 – C’est que l’amour avant d’être fusion, est
altérité : Jean-Pierre Vernant le présente comme le principe qui « rend manifeste la dualité, la multiplicité
incluse dans l'unité » (1). On pense alors à la procréation qui
transforme un couple fusionnel en générateur d’une multiplicité d’enfants.
Alors, l’amour s’accomplit dans la procréation.
Tiens… Revoilà la problématique du mariage gay…
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(1) Jean-Pierre Vernant, L’individu,
la mort, l’amour. Soi-même et l’autre en Grèce ancienne, Paris, Gallimard,
1989.
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