Sunday, December 02, 2012

Citation du 2 décembre 2012



N'importe quel objet peut être un objet d'art pour peu qu'on l'entoure d'un cadre.
Boris Vian

Je vois deux sens possibles pour cette pensée de Vian :
- D’abord, la plus évidente : l’art n’est qu’une convention, il suffit de l’installer dans une galerie d’art ou dans un musée pour que n’importe quelle croute, n’importe quelle platitude devienne instantanément admirable et sujette à gloses.
Je pense par exemple à Rousseau qui enseigne à Emile à mépriser cet effet de la convention en lui faisant encadrer ses dessins, de telle sorte que les premières ébauches malhabiles soient pourvues d’un volumineux cadre doré, et que la forme la plus aboutie de son dessin soit dépourvue de ce luxe.
Dans un autre domaine, je pense aussi aux poèmes dont le seul contenu est l’obscurité et qui sont pour cela l’objet d’admiration (voir par exemple ici).
- Mais on peut aussi dire que l’objet d’art dépend du regard qu’on porte sur lui. C’est ainsi qu’un tas de charbon dans un coin d’un Musée, tout comme un urinoir, peut apparaitre comme un objet d’art.
Je ne veux pas dire que ce soit systématiquement inepte. L’objet quotidien, même l’objet manufacturé peut être artistique s’il est considéré comme une forme dépouillée de sa fonction habituelle – telle est l’ambition des ready-mades. La question est alors de savoir comment susciter ce regard : faut-il un lieu spécial, comme un musée ou une Galerie d’art ? Faut-il comme le dit Vian lui ajouter un encadrement ?
Je suis enclin à le suivre sur ce point : comme le montre cette photo prise à la réderie d’Amiens (1), le lieu importe peu, mais le cadre est quand même utile.

Réderie d’Amiens (Cliché J-P Hamel)
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(1) La réderie (= braderie en dialecte picard) a lieu deux fois par ans, fin avril et début octobre. On peut y trouver des choses passionnantes, mais il est recommandé d’être bien chaussé.

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