La plus grande faiblesse de la pensée contemporaine me paraît résider dans la surestimation extravagante du connu par rapport à ce qui reste à connaître.
André Breton
Voilà une citation à laquelle je souscris totalement – à
une condition toutefois : retirer l’adjectif « contemporaine » qui vient restreindre sa portée.
En effet on a toujours
voulu croire que la connaissance acquise recouvrait la totalité du
connaissable. On a été certain que l’Asie était proche de l’Europe au point
d’espérer l’atteindre en trois semaines de navigation vers l’ouest. On a dit
qu’il était évident que le mouvement du soleil et celui de la lune étaient de
même nature (= tous les deux des mouvements réels). On a pensé qu’il était
possible de transmuer le plomb en or…
On pensera qu’il s’agissait là de survivances de l’esprit
mythique, mais qu’aujourd’hui la rationalité a définitivement gagné la partie,
liquidant enfin les brumes qui pourraient faire croire que les fables ont
autant de force que les vérités scientifiques.
On a deviné que ce trait vise les créationnistes, et
c’est vrai : car nous devons (comme le disait Bachelard) savoir qu’il y a
des erreurs qu’on ne peut plus commettre. Mais est-ce que, pour autant, nous possédons
la vérité ? S’il y a de l’inconnu, qui pourrait jurer que n’en surgira pas
un jour quelque nouvelle découverte capable de remettre en cause des pans
entiers de notre savoir ? (1)
Comment faire pour ne pas surestimer le connu par rapport
à l’inconnu ?
La bonne question est : que peut-on savoir quand on ne sait pas tout ? Si je calcule
la racine de 2, comment puis-je être sûr – absolument sûr – qu’on ne parviendra
jamais, même après des siècles de calcul, à un chiffre exact ? Seule une
démonstration mathématique (il en existe depuis l’antiquité) peut me donner
cette certitude (2).
Autre exemple : ce que je sais du rapport de
l’esprit et du corps est-il si assuré ? La connaissance de mortalité
ou de l’immortalité de l’âme (ou comme on voudra l’appeler) sera-t-elle un jour
autre chose qu’une croyance ? Et en attendant, ce que la science nous révèle
quant au fonctionnement du cerveau est-il si solide ? Dans les années 60,
mes profs de psycho m’apprenaient que les neurones crevaient progressivement
après l’âge de 25 ans et que rien ne pouvait inverser le processus. On dit qu’il
est prouvé aujourd’hui le contraire…
… et si – suite à une petite manip de rien du tout sur le
génome humain – ça pouvait repousser indéfiniment ?
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(1) Comme le jour où l’on a cru que les neutrinos
allaient plus vite que les photons !
(2) On ferait la même remarque à propos du nombre pi.
1 comment:
Le partage votre avis sur dans ce billet et merci de vous acting sur mon blog en commentaire je vous embrasse.
bonne semaine
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