Le socialisme aux États-Unis diffère totalement du
socialisme européen. L’idéal du travailleur américain est de devenir patron,
alors que l’ouvrier latin rêve surtout la suppression du patron.
Gustave Le Bon – Les incertitudes de l'heure présente (1923)
p. 51 de l’édition électronique
Dans ces aphorismes, Le Bon dégorge un peu de sa haine
du socialisme en général et du bolchevisme en particulier : car ce sont,
selon lui, des gens pour qui il s’agit de nier les élites ; au mieux,
c’est pour prendre leur place : être patron à la place du patron ;
mais il y a pire : vouloir abolir totalement la hiérarchie
Et aujourd’hui ? 90 ans après ce commentaire quel
serait le nôtre ? Les exemples si nombreux de fermeture d’usines et de
luttes véhémentes contre les licenciements nous donnent un tableau assez
nouveau de la situation. Logiquement, les ouvriers mis à la porte par des
patrons devraient toujours vouloir leur place. De nos jours c’est parfois possible : ça
s’appelle fonder une SCOP. On sort ainsi de l’utopie et en même temps de la
violence révolutionnaire. Des élites, il y en a partout – et même chez les
ouvriers, ce que Le Bon niait farouchement – mais on n’a pas pour autant trouvé
la solution aux misères des travailleurs ravalés au rang d’outil de production.
C’est qu’aujourd’hui, qui est le patron ? Qui
décide et qui commande ? On disait autrefois : le Roi règne mais il
ne gouverne pas. Eh bien aujourd’hui, dans l’entreprise, les actionnaires
règnent et ils ne gouvernent pas. Seulement, régner, ça veut dire donner des
ordres à celui qui gouverne.
Et les ouvriers ? Vont-ils séquestrer le patron
dans son bureau ? Inutile, puisqu’il n’est finalement qu’un salarié comme
eux. Vont-ils manifester devant le siège de l’entreprise ? Bof… Mieux
vaudrait aller assiéger les fonds de pensions qui possèdent le vrai pouvoir.
Occasion de faire un beau voyage aux Bermudes ou aux
Iles Caïmans…
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