« [C’était] une grosse dondon dont je vous dirais volontiers (…) qu’on la baiserait pendant deux mois sans relâche, sans la baiser deux fois au même endroit. »
Diderot - Lettre à Sophie Volland (7 octobre 1760)
…on la baiserait pendant deux mois sans relâche : que ceux qui ont ricané en lisant ça rougissent de honte. Diderot veut simplement dire qu’on pourrait déposer des baisers sur le corps de cette dame pendant deux mois, sans que ça se chevauche.
Voici donc une nouvelle définition pour notre dictionnaire :
- Baiser subst. masc. Unité de mesure de surface de la peau.
Ex. : Chéri, j’ai encore pris trois baisers de tour de taille ce mois-ci.
On croit badiner, et tout à coup le propos se révèle sérieux. Car depuis la révolution française, on utilise des unités de mesure abstraites. C’est ainsi qu’un mètre peut servir aussi bien à mesurer la taille d’un homme que les dimensions d’un champ, ou encore (sous forme de kilomètres) la distance entre deux villes.
Or, si dans l’ancien régime les mesures étaient tellement nombreuses, c’est qu’elles n’étaient pas abstraites : certaines d’entre elles étaient en rapport directe avec ce qu’elles servaient à mesurer (1). Exemple : le journal qui servait à mesurer la surface des champs, et dont l’aire était définie par la surface labourable par un homme en un jour (= journal). La mesure nous apprend quelque chose de ce qui est mesuré : alors que 100 hectares ne signifient pas grand chose en eux-mêmes (s’agit-il de terre labourable, de prairie, de désert, on ne sait), le journal nous dit « voici de combien de jours un homme aura besoin pour cultiver ce champ ». Supposons qu’on dise : « Ce terrain de foot mesure 3 journaux » : absurde !
Alors, certes la physique connaît des unités aussi élaborées. Mais l’unité de travail d’une force (le joule) sert aussi bien à mesurer l’énergie que je dissipe en tapant sur les touches de mon clavier, que ce que j’absorbe en mangeant mon yaourt. Abstraction pure.
Je propose donc qu’on revienne à un système de mesure concret, dont les unités aient un sens.
Pour commencer :
- La sieste. Unité de temps servant à mesurer une durée dans la journée d’un homme
Ex. : ce travail m’a pris trois bonnes siestes.
(1) Attention à ne pas confondre avec l’origine de l’unité de mesure, telles que la coudée, le pied, etc., qui pouvaient servir à mesure n’importe quoi. Leur particularité était seulement d’être défini à partir du corps, ce qui dispensait d’allez chez Castorama pour trouver le triple mètre rétractable.
4 comments:
"certaines d’entre elles étaient en rapport directe avec ce qu’elle servait à mesurer (1). Exemple : le journal qui servait à mesurer la surface des champs, et sont l’aire était définie par la surface labourable par un homme en un jour"
Depuis que tu as quitté l'éducation nationale, ton orthographe se relâche Jean-Pierre. ;)
Je dois avouer que j'ai bien fait la faute de sens sur le mot baiser.
Toutefois avouer que cette version était pour le moins assez déconcertante; "baiser deux mois sans relâche, sans la baiser au même endroit".
Je sais pas vous, mais moi ça me laisse rêveur...
"Depuis que tu as quitté l'éducation nationale, ton orthographe se relâche Jean-Pierre."
- OK,jeunes gens, voilà une bonne raison de travailler jusqu'à 70 -ou 75 ? - ans. Vos enfants seront ravis de ne pas avoir à financer vos retraites.
Je sais pas vous, mais moi ça me laisse rêveur...
- Ça prouve que nous sommes beaucoup plus pervers que Diderot : il est temps de restaurer l'Inquisition.
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