Sunday, January 09, 2011

Citation du 10 janvier 2011

Lorsque quelque chose a été dit et bien dit, n'aie pas de scrupules. Prends-le et copie-le.

Mark Twain

A l’heure où l’on s’indigne du pillage d’un ouvrage déjà ancien réalisé par un auteur connu dans sa bio d’Hemingway (1), il serait bon de revenir sur l’usage légitime de la copie.

On est parait-il à une époque où la pratique du copier-coller s’est répandue dans les facultés, sur les bancs des étudiants – quand ce n’est pas derrière les chaires des professeurs – et on s’en désole.

Du temps où j’enseignais, les élèves pris en flagrant délit de « pompage » (c’est comme ça que ça s’appelait alors), se défendaient en disant qu’il n’y avait rien de mieux à dire.

Autrement dit : Lorsque quelque chose a été dit et bien dit, n'aie pas de scrupules. Prends-le et copie-le….

Voilà : l’essentiel est dit. Ce qu’on reproche au copieur, c’est – outre sa malhonnêteté s’il s’adjuge le passage en question comme étant sa propre production (2) – de ne pas avoir su écrire autre chose. Si je me donne le mal de lire un livre, bien entendu ce n’est pas pour relire ce que j’ai déjà lu ailleurs.

Le copiage ou le plagiat ont pourtant aussi leur fonction dans la production – voire même dans le mode d’existence – d’un texte. C’est au concept d’intertextualité (= système de tout ce qui met un texte en relation avec un autre) de Gérard Genette que nous pensons (Voyez l’analyse qui en est faite ci-dessous (3) : le plagiat y est cité nommément comme un mode de l’intertextualité, aux côtés de la citation et de l’allusion). Le principe fondamental ici est qu’un texte n’est pas seulement la chose écrite, mais qu’il se définit aussi par le(s) contexte(s) dans le(s) quel(s) il apparaît.

--> Et donc, le plagiat (quand il n’est que partiel bien sûr) n’est fautif que dans la mesure où il prive le texte de son contexte original et donc altère sa signification. Par contre il peut fort bien l’enrichir d’une signification nouvelle en l’introduisant dans un nouveau contexte.

Supposez un instant (vous allez rire) que Genette du fond de sa retraite (il doit avoir maintenant 80 ans) lise mon Blog et en reproduise un passage dans une de ses publications ; nul doute qu’il enrichirait mon écrit en l’introduisant dans son œuvre. Aurais-je à m’en plaindre ?

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(1) Il s’agit du livre à paraître de P.P. d’Arvor (alias P.P.D.A.), qui se protège comme il peut derrière un gros mensonge de l’éditeur. Mais le pire est qu’on comprend qu’en fait l’auteur véritable – et donc responsable – n’est pas P.P.D.A. mais son nègre…

(2) D’ailleurs on admet la plupart du temps, que la copie est légitime si seulement on a payé pour la faire : ce qui veut dire que le plagiat n’est une faute que dans le domaine de droits d’auteurs.

(3) On peut lire ici cet article qui commence ainsi : « L'intertextualité = « relation de coprésence entre deux ou plusieurs textes, c'est-à-dire éidétiquement et le plus souvent, par la présence effective d'un texte dans un autre. » — forme explicite et littérale : la citation. — forme moins explicite : le plagiat (emprunt non déclaré, mais encore littéral). — forme encore moins explicite et moins littérale : l'allusion (« énoncé dont la pleine intelligence suppose la perception d'un rapport entre lui et un autre auquel renvoie nécessairement telle ou telle de ses inflexions, autrement non recevable. »

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