Thursday, July 12, 2012

Citation du 13 juillet 2012


Toute activité orientée selon l'éthique peut être subordonnée à deux maximes totalement différentes et irréductiblement opposées. Elle peut s'orienter selon l'éthique de la responsabilité ou selon l'éthique de la  conviction.
Max Weber, Le Savant et le Politique (1919)
L’un des dilemmes irritants de la morale consiste dans cette opposition entre deux manières différentes de choisir : l’une qui repose sur la considération des valeurs (en amont de l’action) ; l’autre sur celle du résultat (en aval de celle-ci).
On a vu hier que Kierkegaard s’en tenait au choix d’agir selon des valeurs (éthique de la conviction), sans tenir compte du résultat (éthique de la responsabilité), parce que l’important est dans la psychologie de l’agent moral. Mais si l’on veut bien entrer dans l’opposition de Weber (1), on voit bien qu’elle est intimement liée à toute action politique – et en particulier à celle d’aujourd’hui. Car le débat du jour (à l’intérieur de la droite) est celui-ci : « Vaut-il mieux vaut perdre sans l’extrême droite que de gagner avec elle ? (morale de la conviction) – ou inversement doit-on dire : l’important c’est de gagner et peu importe comment » (morale de l’efficacité).
Ce qui est important, c’est de remarquer qu’on a affaire à un choix qui est d’abord moral et pas seulement politique. J’admets bien sûr que ceux qui affirment que « l’important c’est d’arriver au pouvoir et peu importe avec qui », sont des gens qui font une carrière politique et non de moraliste.
Mais il ne faut quand même pas croire que tous ceux qui mettent en avant l’efficacité politique soient des petits machiavels, dénués de tout sens moral. Beaucoup d’entre eux ne veulent pas évacuer complètement la question des valeurs. Ils disent : « Oh, ces gens-là (= ces électeurs d’extrême-droite avec qui  nous faisons alliance) ne votent pas selon des valeurs ; ce sont seulement des protestataires : ils ne votent pas pour – ils votent contre. » ; mais ils sont obligés de compléter : « Nous, qui avons des valeurs nous allons les aider à les découvrir. » D’ailleurs les débats qui agitent la recomposition des partis de droite en France s’intitulent : Débats sur ce que sont nos valeurs.
Alors, puisqu’il y a morale, il y a forcément dilemme. Le dilemme consiste donc à dire : ou bien j’affirme la pureté de mes valeurs, mais alors mon action échouera forcément à les réaliser complètement ; ou bien je vise l’efficacité de mon action, mais alors je trahis peu ou prou mes valeurs.
Ou bien le tout ou rien ; ou bien le moins mal possible. De toute façon on ne peut quitter le domaine de la valeur, parce qu’une politique sans valeurs c’est le cynisme.
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(1) Texte à lire ici

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