Sunday, July 01, 2012

Citation du 2 juillet 2012


L'univers est vrai pour nous tous et dissemblable pour chacun.
Marcel Proust – La Prisonnière
Voyez comme les choses sont simples quand on les pense, et compliquées quand on les dit.
C’est ainsi que Proust nous donne une intuition lumineuse de ce qui distingue la poésie de la science, intuition qui devient bien compliquée pour qui voudrait la développer. Car, c’est pour le poète que le monde varie tel un miroir, nous livrant un reflet toujours nouveau à chaque regard (= L'univers … dissemblable pour chacun), alors que la science dans sa prétention de le percer jusqu’à l’os nous livre du solidement immuable (= L'univers est vrai pour nous tous).
Reste le paradoxe : comment le monde peut-il être à la fois vrai pour tous et dissemblable pour chacun ? Car s’il est vrai pour tous, il doit bien l’être aussi pour chacun. Tel il est en vérité pour toi, tel il doit aussi l’être pour moi. Et ne disons pas que ce qui est vrai, c’est seulement ce que tous nous avons admis, que c’est donc une opinion commune – parce que la vérité scientifique s’impose comme l’irréfutable et non comme le probable.
On dirait peut-être plus simplement que la vérité pour la science, c’est ce que mesurent ses instrument, que la lumière de la lune, captée par les objectifs de ses lunettes, c’est une certaine fréquence. Par contre, pour le poète – et donc aussi pour chacun d’entre nous, la lumière de la lune, c’est quelque chose entre l’argenté et le cendré, c’est une blancheur blafarde ou parfois un reflet cuivré, c’est…
Arrêtons, parce qu’on n’est pas prêt d’en avoir fini : cela change non seulement selon les individus, mais aussi selon les jours, voire même selon les heures et les instants.
Disons plus simplement que la lune, c’est ce qui fait chanter les Pierrots.

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