Friday, July 17, 2015

Citation du 18 juillet 2015

Ce que tout homme d'une certaine nature, plutôt écartée que supérieure, garde avec le plus de vigilance, c'est le secret de son âme et des habitudes intimes de ses pensées. J'aime ce Dieu Harpocrate, son index sur sa bouche.
Maurice de Guérin Journal, lettres et poèmes – Edition 1865
Commentaire I

A gauche, Harpocrate Statue hellénistique – Musée de Salonique  
A droite, l’Harpocrate réalisé par Louis-Philippe Mouchy, 18ème siècle
Exemple de glissement du sens de la représentation : Harpocrate est  un Dieu enfant, figuré traditionnellement par les Egyptien avec un doigt sur la bouche en un geste enfantin. Repris ensuite à l’époque romaine, il fut interprété comme un Dieu recommandant le silence du secret, un doigt sur la bouche en signe de mutisme. (Lire ici le passionnant article de Philippe Matthey sur le signum harpocraticum).
Est-il donc si difficile de garder un secret qu’il faille un Dieu pour nous le recommander ?

Une petite histoire tirée de la mythologie pour se faire une idée. On raconte que le roi Midas ayant préféré la flûte de Pan à la lyre d'Apollon, le dieu irrité orna sa tête d'une magnifique paire d'oreilles d'âne. Midas cachait à tous cette difformité, quand son barbier, qui avait découvert le secret et qui ne pouvait le garder, le confia à la terre après y avoir creusé un trou qu'il se hâta de combler ; mais à cette place poussèrent des roseaux qui, au moindre souffle du vent, répétaient à tous:
"le roi Midas a des oreilles d'âne ... le roi Midas a des oreilles d'âne ... "
Voilà : il est terrible de devoir garder un secret ; c’est comme si une force invincible nous poussait à dire ce que nous savons, surtout si personne d’autre que nous ne le sait. Tout cela ressemble furieusement au retour du refoulé, qui ne peut rester sans se montrer, sans exister pour autrui. Et en même temps, dire ce secret, violer le refoulement dont il est l’objet est une culpabilité dont justement, le secret ne sera pas conservé. Le vent dans les roseaux le dira…

La suite à bien tôt… si je veux bien.

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