Il y aura toujours dans la foule un crétin qui, sous
prétexte qu'il ne comprend pas, décrétera qu'il n'y a rien à comprendre.
Amélie
Nothomb – Péplum (1996)
CRÉTINISME, subst. masc.
A. MÉD. État
pathologique, caractérisé par une diminution ou une absence totale des facultés
intellectuelles…
TLF
« C’est chiant ! ». Ça, c’est l’exclamation du crétin à qui on demande un peu de réflexion et quelques minutes d’attention – à supposer que ce ne soit pas au service de l’« entertainment » habituel.
C’est cette confiance aveugle dans leur ignorance qui assure
aux crétins que leur bêtise est l’aune de la sagesse ; car, ce qui est
crétinisme en solo devient sagesse collective. D’ailleurs cela ne nous
surprendra pas : c’est comme ça que les « gourous » des sectes
actuelles ont une influence suffisante pour prendre le contrôle des
cerveaux : faire que la « vérité » ne soit rien d’autre que
l’opinion infusée par eux dans la collectivité.
Mais il y a plus dans cette citation : l’idée est aussi
que pour certains, l’ignorance n’existe pas. Tout ce qu’on ignore est en
réalité erreur, ou plutôt question inappropriée. Du coup on a mille fois raison
de s’en détourner en haussant les épaules. Vous vous doutez bien qu’en écrivant
cela le prof de philo que j’ai été se réveille. La philo est en effet conçue par
beaucoup comme l’art de poser des questions idiotes, des questions qui ne se
posent pas et - pire ! – de tordre
les questions évidentes pour les rendre incompréhensibles. Et c’est un peu
vrai : on le sait, le philosophe est un déménageur de questions ; mais
une fois qu’il a fait cela, il se transforme en monteur de problématique, c’est
à dire qu’il fabrique un système de questions. Il ne lui reste plus qu’à élaborer
des concepts pour résoudre tout ça et à les organiser en système. Hop là !
Amélie Nothomb précise que ce refus de l’effort intellectuel
conduit tout droit au crétinisme, c’est à dire à la déficience
intellectuelle : je veux croire en effet que cette déficience n’est pas
originelle et qu’elle résulte de ce mépris de la réflexion. Occasion de le
rappeler : le cerveau a en commun avec les muscles de se développer – ou du
moins de se conserver – par l’effort. C’est le refus de l’effort qui conduit à
l’atrophie. Alors quand les séniors font des mots cachés pour entretenir leurs
facultés cérébrales, ce qu’ils sauvent est proportionné à leur effort, c’est à
dire pas grand chose. Mais ceux qui en veulent plus, n’ont qu’à faire de la
philo ! Car en plus ils sauront répondre aux questions de Kant :
- Que
puis-je savoir ?
- Que
dois-je faire ?
- Que m’est-il
permis d’espérer ?
- Qu’est-ce
que l’homme ? (1)
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(1) Lire ici. Les petits facétieux qui affirment qu’il faut
ajouter à cette liste « Dans quel état j’erre ? » et puis
« Pourquoi elle veut pas cette s… ? » découvrirons ainsi qu’ils
sont affectés de crétinisme.
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