Monday, April 04, 2016

Citation du 5 avril 2016

Le maître qui … est vraiment sage, ne vous invitera pas  à entrer dans le logis de sa sagesse, mais il vous conduira bien plutôt jusqu’au seuil de votre propre esprit.
Khalil Gibran
Qu’est-ce en effet que la sagesse ? Les dictionnaires répondent à cette question, parfois avec pertinence, parfois de façon fumeuse, mais en général ils insistent sur le fait qu’être sage c’est savoir mener une vie pleinement épanouie et posséder l’art de la bonne décision (1).
Aujourd’hui, on a découpé la sagesse en deux : d’un côté, l’art de décider que possèdent les décideurs (!) ; de l’autre les spécialistes du développement personnel. De toute façon, on n’a plus besoin de sages, les coaches y suffisent.
Résultat : ceux qui se sont encore intéressés aux sages n’ont vu en eux que des formes confuses, qui de loin, dans la brume, leurs faisaient des signes qu’ils interprétaient comme ils pouvaient.
Mais il y a encore des gens exigeants qui pensent que les sages de l’antiquité avaient quelque chose à nous apprendre, quelque chose d’intemporel. Ainsi de notre auteur-du-jour, pour qui la sagesse consiste à suivre le maitre qui saura nous amener à développer notre esprit. Loin du coaching un peu naïf des psys ou de la béatitude rose-bonbon des bazars orientaux, le maitre est celui qui nous force à développer notre esprit, qui ne nous tolère aucune approximation dans notre réflexion, ni aucune lassitude dans l’effort intellectuel. Et tant pis  pour les gens fatigués, comme dit Jacques Rancière.
Bien sûr, le sage n’a rien à vendre, aucune recette, aucune maison-de-sagesse à nous proposer ni aucun ashram à nous louer. La véritable sagesse nous dit Khalil Gibran c’est do it youself.
On le voit, une fois fixée la feuille de route, la question qui reste en suspens est comment parvenir au bout du voyage – c’est à dire « au seuil de notre propre esprit ».
« Au seuil de notre propre esprit » : qu’est-ce que ça veut dire ? S’agit-il de se connaitre soi-même comme le préconisait Socrate ? Ou de maitriser sa pensée par la méditation, comme  un moine tibétain ?
Peut-être. Mais je croirais plus volontiers qu’avant de la maitriser, il s’agirait de produire sa propre pensée, de lui permettre de jaillir – ou plutôt d’exercer son cerveau jusqu’à ce qu’il s’enrichisse de nouvelles connexions le rendant capable de cela…
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(1) On notera que je ne fais pas référence ici à la possession de la science la plus générale et en même temps la plus approfondie, car de nos jours cette notion ne fait plus partie de l’idée de sagesse

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