L'amour
n'existe plus. La religion, sa nourrice, a les mamelles pendantes comme une
vieille bourse au fond de laquelle il y a un gros sou.
Alfred de Musset – Fantasio (1834)
(Oui,
la religion, comme nourrice, elle ne fait pas envie).
La religion, nourrice de l’amour. Voilà une information de première
importance, tant pour comprendre l’origine de l’amour que pour évaluer la
fonction religieuse.
D’abord, il
convient de rappeler que depuis l’antiquité on distingue deux formes d’amour :
l’amour-éros et l’amour-agapè. Le premier concerne le
désir sexuel et tout ce qui va avec ; le second est cet amour spirituel
qu’on rencontre avec l’amour divin et aussi certaines formes d’amour
inconditionnel et romantique chez les humains. Du coup on n’est pas trop
surpris de trouver ce jugement sous la plume de Musset, parce que nous savons
bien que cette dévitalisation de l’amour spirituel, qui laisse libre cours à
l’amour charnel, ne paraît pas trop le gêner (1).
Oui, s’il est
vrai que la religion soit une forme parmi d’autres de spiritualité, alors elle
a pu donner naissance à des adorations très profanes mais vécues come une
transcendance absolue. Le philtre d’amour (2) qui a uni Tristan et Iseult
montre cette forme d’amour humain qui n’est pas seulement inconditionnel, puisqu’il
s’accompagne d’une adoration qu’on croirait réservée à Dieu.
Maintenant, de
quoi est fait l’amour véritable, je veux dire non pas l’amour qui se dévoile dans
les mythes mais celui qui s’épanouit au grand jour ? A lire certains
poèmes qui nous sont proposés sur Internet, l’amour-agapè existe toujours, mais il est mêlé de façon inextricable
avec l’amour-éros. Ce qui paraissait si évident, je veux dire : la partition de l’amour en deux formes
différentes et séparées par une cloison étanche – l’un tourné vers la chair,
l’autre vers l’âme – ne l’est finalement pas
tant que ça. En réalité, même si l’amour « vulgaire » est toujours un
amour charnel, il n’est pas étranger à l’amour céleste, uniquement tourné vers
l’âme (3).
Comme le
disait Céline : « L’amour, c’est infini à la portée des
caniches ». (Cité le 30/06/2006)
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(1) voir la Citation du 30 juin 2007.
(2) « La
puissance du philtre est telle qu’après absorption, les amants sont épris et
heureux pendant trois ans, et qu’une séparation leur serait insupportable,
voire fatale » dit Wiki. Comme le dit Frédéric Beigbeder, l’amour dure trois ans. On vérifie ainsi que l’auteur du roman éponyme a des lettres classiques.
(3) Rappelons
que dans le Banquet, Platon, via le
Discours de Pausanias, réserve cet amour à celui qui se détourne des femmes
pour aller vers les garçons.
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