Le pouvoir
d’un Président (de la République) consiste à se faufiler dans le labyrinthe des
empêchements.
Sylvain Tesson – Sur les chemins noirs
(p.67)
« Se faufiler dans le labyrinthe des
empêchements » : voilà à quoi il faut penser quand on réfléchit
au bilan du Président Hollande (mais sans doute aussi de n’importe quel autre
Président qui l’a précédé). D’ailleurs, que pouvions-nous attendre
raisonnablement de lui ? Qu’il change la nature des hommes et des pays qui
environnent la France ? Qu’il agisse sur la mentalité des citoyens, les
détournant de frauder le fisc ou de se rebeller contre les décisions de
l’exécutif ? Bref, qu’il fasse des miracles ?
Au cours de
son exploration de la France rurale, Sylvain Tesson découvre une sagesse
aujourd’hui bien oubliée : quand on dépend de la nature, on ne peut pas
renverser les obstacles, on ne peut que composer avec eux (1). On dira que le
louvoyant François Hollande avait des dispositions pour cela, et que, s’il
avait seulement fait cela correctement, on n’en serait pas là où nous en sommes
aujourd’hui – Certes, mais au moins sachons ce que nous avons à lui reprocher
au lieu de lui jeter à la tête les pires insultes qu’on puisse imaginer.
Vous vous
doutez bien que je ne prends pas la défense d’un homme qui en ce moment
frétille d’aise en songeant qu’il n’a plus que 4 mois à tirer à l’Elysée ;
ce que je veux faire ressortir, c’est que nous ne devons pas attendre des
candidats à sa succession de faire mieux que ce qu’il aurait pu faire et qu’il
n’a pas fait (vous me suivez ?)
Bref :
l’art du politique n’est pas de renverser les obstacles, mais de les contourner
et pour cela de bien les connaitre. Voyons par exemple ce qui nous stupéfie
dans le programme de François Fillon, le candidat de la droite. Alors qu’un
combat fratricide a opposé le gouvernement Valls et sa majorité, soutenue en
cela par l’opinion publique, à propos de la loi-travail (considérée comme
détruisant le droit des travailleurs), voici que François Fillon annonce
tranquillement qu’il va jeter au feu le Code du Travail, faire travailler plus sans gagner plus (du moins pour
les fonctionnaires) ; et pour faire bonne mesure le voici qui propose de
remplacer la sécurité sociale, un des acquis de la République, par des caisses
de santé privées. Ce qui étonne au plus haut point, vous l’aurez compris en
lisant Sylvain Tesson, c’est que cet homme politique expérimenté n’ait pas vu
qu’il y avait là des obstacles incontournables – ou peut-être que les ayant
perçus comme tels, il les ait néanmoins considérés comme n’étant pas infranchissables.
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(1) Rencontrée
auprès des paysans qui composent avec la nature, cette conviction conduit Sylvain
Tesson théoriser l’art de l’esquive et de l’évitement. « Fuir, c’est
commander… c’est au moins commander au destin de n’avoir aucune prise sur
vous. » Idem – p. 36. Epictète et
Marc-Aurèle réunis n’auraient pas dit mieux !
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