La fonction de l'artiste consiste, autant qu'à créer des images, à les nommer.
Jean Dubuffet
1 - Quand vous allez dans une expo de peinture (ou de sculpture) allez-vous systématiquement voir le titre de l’œuvre devant la quelle vous vous trouvez ?
2 - La Joconde est-elle un titre choisi par Leonard de Vinci ? S’il a choisi de la nommer différemment (Mona Lisa) perdons-nous quelque chose en l’oubliant ? S’il ne l’a pas nommée du tout, l’œuvre en est-elle affectée ?
3 - Les œuvres contemporaines sont parfois sans titre propre (« Compositions en rouge jaune et bleu » (Mondrian), les « Nus couchés », les « Untitled ») ou bien désignées par des numéros. Pensez-vous que ces artistes renient leur art en faisant ça ?
On l’aura compris : cette citation m’interpelle, comme on dit, mais je n’arrive pas à lui donner une véritable consistance.
Doit-on admettre que Dubuffet, dans un effort pour découronner l’acte créateur, en viendrait à dire que le fait de titrer une œuvre est aussi important que de la créer ; et donc que créer ce n’est pas plus important que titrer.
Mais à ce compte, l’image finit pas se résorber dans l’inessentiel, parce que le titre c’est du langage, donc de la chose imprimable. On n’a plus qu’à fermer les musées et les remplacer par des catalogues.
On lui fera le crédit de penser que cette faible hypothèse n’est pas valable, et que sa véritable pensée est ailleurs.
Supposons donc qu’il veuille dire que le titre restitue le contexte de l’œuvre, et que celui-ci doive être défini par l’artiste afin que l’oeuvre ait un sens. Dès lors,
- ou bien il faut titrer l’œuvre pour restituer son « hors-champs », ce quelque chose qu’on devrait voir si les murs du musée étaient transparents.
- ou alors il faut faire du musée le contexte de l’œuvre en l’intégrant à sa création : c’est ce qui se passe pour les Installations.
Les gens malintentionnés diront que l’avantage c’est que l’œuvre ne survivra pas à son déménagement. (1)
(1) A méditer en cette journée du Patrimoine.
2 comments:
Bonjour,
Pour ma part, je pense simplement que le titre, peut servir de mise en relief de l'œuvre.
Si l'on prend la tableau de Picasso Guernica (voir ici) sans son titre, le tableau représente une scène manifestement violente, sans être vraiment apporter beaucoup plus d'explication.
Avec son titre, on sait que Picasso fait référence à un village espagnol détruit durant la guerre civile.
L'œuvre est auto-suffisante, pour faire passer son message (ici une représentation de la guerre), le titre, sert à situer plus précisément le propos.
L'œuvre est, et restera, à mon sens, le tableau. Le titre n'est qu'un "indice" pour le "spectateur" pour mieux comprendre sa signification.
Par contre, pour l'art contemporain, on peut parfois voir certains "artistes" qui expose leurs œuvres non plus cette fois avec un simple titre, mais un texte explicatif au complet et là, je serai bien plus sceptique quand à la qualité de l'œuvre qui n'est plus dissociable de son explication.
L'œuvre est auto-suffisante, pour faire passer son message
- Oui, le message passe incontestablement, mais c’est peut-être « un » message et pas forcément « celui » voulu par l’artiste (Picasso dénonce la barbarie fasciste).
Je suis adepte de la liberté créatrice du spectateur : libre à lui d’imaginer ce qu’il veut devant une œuvre quelconque. D’ailleurs qui donc demanderait le titre de la symphonie qu’il entend ? Qui chercherait à retrouver les vers qui jalonnent les Quatre saisons ?
Reste que, pour une raison que je ne m’explique pas, la plupart des gens, dans les expo de peinture, vont d’abord voir le titre avant de regarder l’œuvre.
Je ne m’explique pas non plus pourquoi j’en fais autant…
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