Sunday, September 02, 2007

Citation du 3 septembre 2007


Si on enlevait l´air du ciel, tous les oiseaux tomberaient par terre.

Jean-Claude Van Damme (1)

La colombe légère qui, dans son libre vol, fend l'air dont elle sent la résistance, pourrait s'imaginer qu'elle volerait bien mieux encore dans le vide.

Kant Critique de la raison pure ", (introduction). (2)

Voyez l’injustice : alors que cette citation de Kant, l’une des plus connues peut-être, apparaît comme la géniale image permettant de comprendre la critique de l’idéalisme, celle de Jean-Claude Van Damme apparaît dans des bêtisiers. Il suffit de citer le nom de notre cinéaste belge pour faire rire : d’ailleurs je suis sûr que vous vous tordez déjà (3)

Bien sûr, il en va ici comme toujours en matière de citation : tout dépend du contexte. Si on considère les citations dans leur ensemble (voir (1) et (2)), on voit que notre philosophe belge s’intéresse plus à la nature de l’air qu’à son rapport aux oiseaux. Et que Kant s’intéresse plus aux colombes qu’à l’air qui les porte. Mais qui donc, à part quelques philosophes y voient malice ?

La vérité, c’est que Van Damme doit être un parfait crétin, parce qu’il se mêle de penser alors qu’il a de gros muscles. Oui, de même que nous avons mis plusieurs siècles (ou plusieurs millénaires, voire même plusieurs millions d’années (4)) à admettre qu’une belle femme pouvait en plus être intelligente, de même nous considérons que Monsieur Muscle est nécessairement bas du plafond. Oui, même Schwarzie, il ne doit la considération dont il jouit aujourd’hui qu’au fait qu’avec l’âge on a fini par les oublier, ses muscles.

Alors, qu’est-ce que ça veut dire tout ça ? Consultons les néo-darwiniens.

Si nous admettons que ce qui compte dans une espèce, c’est ce dont elle dispose pour se propager à travers des millions d’années, nous dirons que la beauté des femmes garantit la procréation, et la musculature des hommes la protection de la progéniture. Mais si la pensée est disqualifiée comme incompatible avec ces caractéristiques, alors c’est que la pensée n’est pas nécessaire pour la sauvegarde de l’espèce - voire même qu’elle y ferait obstacle.

On a presque envie de se faire créationniste.


(1) Citation complète : " Je suis fascine par l´air. Si on enlevait l´air du ciel, tous les oiseaux tomberaient par terre....Et les avions aussi.... En même temps l´air tu peux pas le toucher...ça existe et ça existe pas...Ca nourrit l´homme sans qu´il ait faim...It´s magic...L´air c´est beau en même temps tu peux pas le voir, c´est doux et tu peux pas le toucher.....L´air c´est un peu comme mon cerveau... " J.C. Van Damme

(2) Citation complète : La colombe légère qui, dans son libre vol, fend l'air dont elle sent la résistance, pourrait s'imaginer qu'elle volerait bien mieux encore dans le vide. C'est justement ainsi que Platon quitta le monde sensible parce que ce monde oppose à l'entendement trop d'obstacles divers, et se risqua au-delà de ce monde, sur les ailes des idées, dans le vide de l'entendement pur."

(3) Oui, je l’avoue, j’ai moi-même exploité le filon.

(4) Lucy qui était déjà une belle femme (comme on peut le constater) était sûrement très intelligente pour son époque.

5 comments:

Anonymous said...

Je pense que ce n'est pas tant ses muscles que son attitude de bouffon tragique constante dont le cerveau est sous acide qui le transforme en un Gruss moralisateur et comique.

Anonymous said...

C'est un peu pessimiste comme post. A mon avis, il y a longtemps que les gros muscles ont cessé d'être des avantages reproductifs dignes de ce nom. De tous temps, et aujourd'hui encore plus, un "gros cerveau" est un atout majeur pour laisser une descendance pléthorique. D'ailleurs, de nombreux grands penseurs ont aussi été de très grands séducteurs (cf. Sartre qui, non content de ne pas avoir de gros muscles, était loin d'être un Apollon). J'avoue néanmoins que devant certains déclarations récentes, on peut se faire du soucis pour les penseurs d'aujourdhui...

Jean-Pierre Hamel said...

Je suis bien sûr tout à fait persuadé que les gros muscles n’ont rien à voir avec les capacités intellectuelles.
Plus généralement, je doute qu’on puisse conclure de l’allure physique à quoique ce soit sur le plan intellectuel. Je me rappelle d’un prof de la Sorbonne (Raymond Polin) dont je me disais : ce type, si je le croise dans la rue, je le prends pour un maçon ou un manœuvre. De ce point de vue je ne suis pas tout à fait d’accord avec Bourdieu et ses conclusions concernant la « Distinction ».

Anonymous said...

En fait le truc avec Van Damme, c'est qu'il nous appose une phrase ahurissante dans le sens. Pour commencer, sans air, il n'y aurait pas d'oiseau, ni d'humain pour les déglinguer ou faire des remarques stupides. Ensuite, quand bien même il n'y aurait pas d'air, JCVD arrive a la simple solution : ils tombent. C'est un constat niais que tout a chacun nous sommes aptes à juger.

Je ne connais Kant que de nom, je ne suis pas philosophe. Mais il me semble que cet homme la tape dans des notions de liberté telle que même la moindre entrave, aussi subtile et minime soit elle, ne saurait exister.

Je pense sincérement que Kant a voulu exprimer le mécontentement constant face à la liberté. Il y a donc à mon sens un rapport entre la liberté possédé et la liberté "utopique", celle que l'on atteint pas mais aprés laquelle nous courrons, dussions nous pour cela recourir a l'imaginaire. Quand bien même nous ayons la possibilité de voler, on s'imaginerait pouvoir voler mieux encore si il n'y avait pas de resistance.

Aprés évidemment une citation reste souvent un extrait de phrase oter de l'intégralité de son texte, que je ne connais pas.

Jean-Pierre Hamel said...

- cet homme la tape dans des notions de liberté telle que même la moindre entrave, aussi subtile et minime soit elle, ne saurait exister.

De fait Kant aborde ici une question liée à la connaissance : les limites du savoir - telles que celles qui nous sont imposées par la sensation - sont en même temps nécessaires au savoir. La métaphore de la colombe est là pour montrer que la volonté peut aller beaucoup plus loin que notre capacité à connaître : mais il faudrait avoir une cervelle d’oiseau pour croire que si on veut, alors on peut.
C’est d’ailleurs cette dernière formule qui montre qu’on n’est décidément pas dans le contexte de la morale kantienne… Mais ça, ça serait pour un autre Post.

- En fait le truc avec Van Damme, c'est qu'il nous appose une phrase ahurissante dans le sens.

Le truc c’est en effet qu’il parle et qu’il ne dit rien. Les points de suspension, qui ont chez Céline une valeur liées à la lecture orale (on pourrait les supprimer sans que le texte perde son sens), sont chez Van Damme des blancs : ce sont des lacunes du sens, telles que si jamais on arrive à en trouver un, alors à coup sûr, c’est qu’on l’y a mis soi-même. It’s pas magic du tout.