Monday, December 10, 2007

Citation du 11 décembre 2007

Déshabillez-moi, déshabillez-moi

Oui, mais pas tout de suite, pas trop vite

Sachez me convoiter, me désirer, me captiver

Juliette Gréco - Déshabillez-moi - Paroles : Robert Nyel. Musique: Gaby Verlor - 1967

Aujourd’hui, la Master class de la chanson : Juliette Gréco nous donne une leçon d’interprétation. Visionnez son interprétation de Déshabillez-moi. Et puis voyez celle de Mylène Farmer.

Première constatation : là où l’une est, disons « érotique », l’autre est franchement pornographique. Certes. Mais surtout, la chanson interprétée par Juliette Gréco nous prend tout entier dans la lente progression du désir ; même pressés, nous ne saurions l’accélérer : comme disait Bergson, il faut attendre que le sucre fonde.

Alors que Juliette nous impose l’attente de la montée du désir, Mylène Farmer presque nue sur scène (= ridicule de demander encore qu’on la déshabille) et cumulant les attitudes provocatrices, est dès le début dans la conclusion de l’acte. La réitération lancinante de la phrase - Déshabillez-moi - devient une provocation jeté à la face d’un public concupiscent ; quant au texte elle aurait gagné à le remplacer par des gémissements suggestifs.

On peut préférer, mais avouez qu’on perd quelque chose en route.

Car on a là toute une pédagogie du désir - au féminin, mais pas seulement (1) - qui nous explique à quoi servent les préliminaires amoureux, pédagogie rendue sensible par la durée de la chanson : 3 minutes 34 secondes. On ne peut pas faire moins. C’est une chanson-recette : recette du désir amoureux (2) ; et comme pour une bonne recette de cuisine, il ne faut pas se tromper dans les proportions et dans la durée de cuisson. Mais quand c’est cuit, alors il faut déguster : le soufflé risquerait de retomber ! Déshabillez-moi, déshabillez-moi / Maintenant tout de suite, allez vite.

D’ailleurs, la métaphore culinaire reste pertinente jusqu’à la fin, quand Gréco-la-Castratrice jette le masque :

- Et vous... déshabillez-vous!

- Oui, chef !

(1) Les paroles ont été composées par un homme, et c’est l’occasion de rappeler que hommes et femmes sont un composé des tendances des deux sexes - C’est encore une fois ce qu’illustraient à merveille les hermaphrodites de Platon.

(2) Et non leçon de séduction. En tout cas, ça va plus loin que les célèbres « leçons de séduction » de la lingerie Aubade

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