Tuesday, October 02, 2012

Citation du 3 octobre 2012



Un sujet normal est essentiellement quelqu'un qui se met dans la position de ne pas prendre au sérieux la plus grande part de son discours intérieur.
 Jacques Lacan – Les Psychoses
Combien de fois ai-je tremblé étant enfant en imaginant que les grandes personnes avaient la faculté d’entendre mes pensées silencieuses grâce à leur « petit doigt » ? (1) Mais garder ce secret ne suffisait pas : il fallait en plus se mettre dans la position de ne pas prendre au sérieux la plus grande part de son discours intérieur.
- Qu’est-ce qu’être normal ? Pour être normal, il ne suffit pas de cacher aux autres ce qui se trame dans notre conscience : il faut en plus ne pas donner de la consistance à ces fantasmes.
Bien sûr, cela signifie ne pas en faire un projet pour un futur passage à l’acte ; mais il faut de surcroît ne pas en ruminer obsessionnellement l’accomplissement. Cela signifie ne même pas en faire un récit, ni même un songe. Bref, que ça reste une vague rumeur, un bruit de fond, un discours inaudible.
- Maintenant, vous vous demandez peut-être : quel genre de type serais-je si j’étais anormal ? Un illuminé annonçant la fin du monde ? Un gourou dominateur ? Un tyran ? Un paranoïaque narcissique ? Un pervers sadique ? Un tueur psychopathe ?
Pour le savoir, prenez une feuille de papier et racontez l’une ou l’autre de vos pensées secrètes – je veux dire de ces pensées que vous avez chassées de votre esprit alors qu’elle le traversait comme un météore. Ecrivez sans faire de fioriture, comme si c’était un rapport de gendarmerie, avec tous les détails, en nommant tous les acteurs de la scène. Pour y arriver, vous allez donc être obligé de prendre au sérieux ces pensées, de les considérer comme si elles résultaient de la réalité, et non de votre discours intérieur. 
Maintenant, prenez garde : cette lucidité n’est pas sans risque : c’est comme ça que vous allez rencontrer le sale type qui se tapit au fond de vous-même.
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 (1) J’ai d’ailleurs consacré ce Post au sujet en citant le dialogue du Malade imaginaire.

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