Wednesday, March 27, 2013

Citation du 28 mars 2013



 Il y a un double interdit, celui aux États de déroger à certains droits, et celui aux hommes de transgresser certaines valeurs, car les franchir conduirait à la négation de ce qui donne son sens à l'humanité.
Mireille Delmas-Marty – Le Monde de l'éducation - Juillet - Août 2001
Au nombre de ces valeurs dont la transgression est interdite figurent sans doute les images saintes du Christ – Admettons-le du moins. Et observons que, du coup, les profanations de l’image du Christ sont des transgressions qui sont d’autant plus jouissives à commettre pour ceux que travaille un anarchisme militant.
Mais ces transgressions sont-elles si évidentes ? Ne risquons-nous pas de nous tromper quand nous les évoquons ?
Pâques est la bonne période pour le vérifier. Trois moments forts qui peuvent devenir des occasions de blasphème : la cène ; la crucifixion ; la résurrection.
1 – La cène de Leonard de Vinci est devenue, depuis le succès du roman de Dan Brown, du pain béni (!) pour les publicitaires : ils détournent fréquemment l’œuvre de Leonard – par exemple comme ici en remplaçant Christ et apôtres par des femmes (sur le thème de la transgression publicitaire, voir ici).


Sacrilège ? Peut-être, mais quand même sacrilège « soft » : esthétisme, abstraction du décor font de cette image quelque chose qui retient l’attention, mais qui  n’est pas censée dégouter.
2 – La crucifixion : là aussi, mettre une femme sur la croix à la place du Christ est une transgression assez courante (signalée ici).
Maintenant, voyez cette image :
  

Non seulement on voit une femme nue crucifiée dans l’exacte position du Christ, mais encore cette femme est visiblement enceinte. Blasphème extraordinairement choquant n’est-ce pas ?
Erreur ! Il  ne s’agit pas d’un blasphème, mais au contraire de la charge d’un parti catholique contre les pro-avortements durant le débat sur l’IVG en Italie (1975)
3 – La résurrection : voyez ce tableau de Rubens représentant le Christ ressuscité sortant de son tombeau. Une puissante érection soulève son pagne et là encore l’horreur du blasphème nous laisse sans voix. 
Rubens, Résurrection du Christ triomphant, vers. 1616.
Pourtant Rubens est non seulement un peintre admiré dans toute l’Europe du 16ème – 17ème siècle, mais il était de plus respecté de tous pour son rôle de diplomate. Il ne s’agit donc pas d’une transgression mais d’une façon  – assez courante à l’époque – de représenter la vie revenue dans le corps du Christ (voir ici)
Concluons : non seulement la transgression dépend du contexte sans le quelle elle n’a pas de signification précise, mais encore, à la différence du blasphème qui est lié au fait de proférer des mots interdits, la transgression suppose une intention offensante pour les croyants.

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