Vos français qui se consolent de tout par un vaudeville,
crient un peu quand la guerre les oblige à lever de nouveaux impôts, et
quelques plaisanteries leur font tout oublier. Ainsi, par un heureux effet de
leur légèreté, le penchant qu’ils ont à la joie l’emporte sur toutes les
raisons qu’ils ont de s’affliger.
Frédéric II – Lettre
79 du 25 juillet 1771 à d’Alembert
Si nos ministres s’inquiètent du grondement de la rue
devant l’augmentation des impôts, qu’ils relisent cette lettre de Frédéric II
de Prusse : qu’ils nous envoient quelqu’amuseur à la télé… ou bien qu’ils
démasquent quelque fraudeur bien gras pour canaliser notre indignation.
Oui, MAIS – j’entends d’ici l’objection :
encore l’Allemagne qui nous fait la leçon ? Et pire encore : c’est le
Roi de la Prusse, ce pays ennemi qui a eu l’audace de nous battre en 1870 et de
nous voler l’Alsace-Lorraine !
Pour ceux qui n’auraient pas cette allergie, il est quand
même intéressant de se tourner vers l’histoire, pour savoir comment les aléas
de l’opinion publique française au 18ème siècle étaient vus depuis
la Prusse, par Frédéric II.
Frédéric II, le fils du roi sergent, que Kant
célèbrera comme le despote éclairé ; celui-là même qui a reçu Voltaire
chez lui, à Berlin (1750), et qui est l’auteur de cette lettre à d’Alembert où
– disons-le – il se moque des français.
Donc, vu de Prusse les français sont des gens peu sérieux,
prompt à s’émouvoir de payer l’impôt et aussi prompt à oublier leur
indignation. Un peu comme ces gentils sauvages qui oublient le matin ce dont
ils auront besoin de soir (1), leur légèreté et leur bonne humeur les conduisent
à négliger ce qui serait sans doute plus important pour eux.
Alors, voilà : même si on peut opposer à ce portrait
des français celui qui les décrit comme des « italiens tristes », il
n’en reste pas moins qu’aux yeux des (futurs) allemands, la France par ses
mœurs, appartient bien à ce groupe de pays qu’on appelle maintenant les pays du
Club Med – Et cela il y a plus de 250 ans.
Donc : surveillez bien l’actualité, car nos
dirigeants après avoir lu ce Post lumineux, risquent bien de s’inspirer de
cette réflexion de Frédéric II au moment de divulguer de montant des impôts de
l’an prochain …
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(1) L’anecdote est rapportée par Rousseau (Discours sur
l’inégalité) : le Caraïbe vend son hamac le matin parce qu’il n’a pas
prévu qu’il en aura besoin le soir.
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