Il faut en convenir : un bon accident, un petit scandale,
une mort, chez des gens que nous connaissons, dans le cercle de nos relations,
chez l'un ou l'autre de nos collègues, si nous sommes employés, c'est une
diversion agréable. Multipliez cela à l'échelle du public : vous avez les
crimes, les grands accidents de chemin de fer, les scandales politiques ou
financiers, sur les récits et descriptions desquels tout le monde se jette.
Paul Léautaud –
Propos d'un jour
Nous jouissons de ce qui nous scandalise : c’est une
tarte à la crème des moralistes qui en profitent pour nous mettre le nez dans
notre hypocrisie. Notre ami cocufie honteusement sa pauvre femme ? La star
s’est tellement alcoolisée qu’il a fallu l’embarquer en cellule de
dégrisement ? Le directeur du FMI a violé une femme de chambre ? Le
ministre en charge des impôts fraude le fisc depuis plus de 20 ans ?
Racontez-moi ça !
Autre tarte à la crème : la multiplication des infos
et la vitesse décuplée de leur diffusion par Internet et les réseaux sociaux.
Aujourd’hui, dit-on partout, chaque usager du net est un journaliste puissance
et chacun de ses lecteurs est un diffuseur de News.
Et alors ? A-t-on posé la question qui
dérange : quelles sont les « news » diffusées justement sur le
Net et en suite par tous les médias ? S’agit-il de faire savoir que le
soleil brille, que la pluie a été suffisante pour nous éviter de rationner
l’eau ? Que Johnny est en bonne santé ? Que le Président de la
République a bien dormi ? Que sa femme ne le trompe pas ?
Vous me direz : mais tout cela ce n’est pas
important et on s’en fiche. Bien. Mais alors, pourquoi s’intéresser à la
maladie de la star ou au fait que la femme du Président le cocufie avec le
premier ministre ?
On a dit et répété que la presse ne s’intéresse pas aux
trains qui arrivent à l’heure et que les bonnes nouvelles ne sont pas des
nouvelles. Mais en disant cela, on ne dit pas encore l’essentiel : le goût
pour la morbidité et la souillure. On aime ce qu’on déteste le plus : la
saleté et les mauvaises odeurs – et si ce n’est pas dans le premier degré c’est
au moins dans le symbolique.
Tiens : on est dimanche ! Allez vite vous
confesser !
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