Friday, June 07, 2013

Citation du 8 juin 2013



Je suis un homme mort. Je ribote avec l'eau de fleurs d'oranger, je me fous des bosses de pilules, je me fais socratiser par la seringue.
Flaubert –  Correspondance, 1844


Un médicament, pilule ou anticoagulant, c'est toujours une substance qui a des effets négatifs.
Gérard Bapt (1)
-->Mot du jour : Socratiser – (ant. grecque et DAF de Sade) 1. Action de sodomiser dans un but d'éducation à la virilité; 2. (fig. soutenu), emporter la conviction finale lors d'un débat de tous types. (Cité ici)
1 – On dit parfois que la gloire pour un homme, c’est de laisser son nom à titre de nom commun dans la langue courante. Ainsi de Platon et de l’amour platonique, ainsi de Socrate et du verbe socratiser.
Seulement voilà : il arrive que des gens un peu sans-gêne s’emparent de ce nom et en transforment le sens sans que personne ne se lève pour protester. Et là on s’étonne que le nom de Socrate, qui désignait précédemment une méthode dialectique particulière, se soit vu assigné à une pratique sexuelle fort décriée, déjà au 18ème siècle comme péché mortel conduisant en enfer les sodomites, et aujourd’hui encore avec le débat sur les mariages-que-vous-savez (2). On en arrive à se dire comme Brassens que les trompettes de la renommée sont fort mal embouchées.
2 – Venons-en au fonds : Flaubert s’estime promis à une mort prochaine du fait de tous les traitements qu’il absorbe. Sans savoir exactement quelle est l’affection dont il souffre (3) on comprend que son propos soit le suivant : si vous êtes malade, comptez sur la médecine pour vous achever. Certes ce n’est pas l’eau de fleur d’oranger, ni les pilules, ni sans doute la seringue dans les fesses (s’agit-il d’un clystère ?) qui peuvent tuer un homme. Mais…
Mais on se dit que les progrès de la médecine, en donnant toujours plus de pouvoir de soigner, lui ont aussi donné toujours plus de pouvoir de tuer. On se sait que le Mediator a été remboursé par la Sécurité sociale comme médicament avant d’être mis au rang des substances vénéneuses. On lit aussi (notre citation) que tout médicament est aussi un poison et qu’il y a toujours, pour chaque remède médicamenteux, une dose létale.
Certes, on ne va pas mettre à la poubelle notre armoire à pharmacie. Mais on va peut-être lire la notice qui est dans les boites, en particuliers à la rubrique « Effets indésirables », même s’il faut prendre une loupe pour y arriver.
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(1) Gérard Bapt est député PS de Toulouse, médecin-cardiologue, membre du conseil d'administration de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – Cité ici
(2) Je laisse de côté l’emploi de la sodomie en tant pratique éducative, car si c’était le sens chez Platon (cf. le Banquet) ça ne l’était évidemment pas chez Sade.
(3) En 1844 il souffrait déjà des crises nerveuses (épilepsie ?) qui l’ont contraint à abandonner ses études.


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