Friday, June 28, 2013

Citation du 29 juin 2013

Qui crie se décrie.
Proverbe auvergnat
DÉCRIER – Verbe transitif.
Détruire par des paroles le crédit de quelqu'un, de quelque chose.
Trésor de la langue française
Après la pensée qui hier n’existait qu’à condition de se contre-penser, voici aujourd’hui le cri qui décrie.
Crier est-il un aveu de faiblesse ? Certains diront qu’au contraire c’est l’affirmation – la « sur-affirmation » – de la certitude où nous sommes de dire la vérité. Crier est alors un engagement total dans les mots qui portent notre pensée, nous crions pour la porter plus vite, plus haut, plus fort. (1)
Que faut-il donc en penser ? Dans le schéma de la communication selon Jacobson (ci-dessous) :


le cri fait partie de la fonction expressive, liée au « destinateur » - à savoir : celui qui parle.
La fonction expressive permet de faire connaitre et donc de transmettre – ce qui en fait un élément du message – quel est l’état émotionnel de celui qui parle. En général, cette fonction est assumée par le ton de la voix, sa vibration etc. Jakobson donne pour exemple d'utilisation de la fonction expressive la répétition, quarante fois, de Segodnja večerom (« ce soir », en russe) par un acteur qui passait son audition chez Stanislavski. Chaque fois cet acteur devait varier l'intonation de « ce soir » selon une situation bien précise, imposée par Stanislavski (Wikipédia ici) (2)
Le cri apporte donc une information concernant non le contenu du message (fonction poétique), mais le locuteur. Et donc le cri signifie que celui-ci est affecté d’une certaine émotion ou passion au moment même où il parle. Laissant de côté le cas où cette émotion n’a rien à voir avec le message, on suppose que si cette émotion portée par notre cri vient altérer son contenu, c’est qu’elle laisse transparaitre la passion au moment même où le parfait sang-froid est requis.
Mais il y a aussi autre chose : le cri une expression de notre partie animale : c’est comme les animaux que nous crions. Le cri peut donc aller jusqu’à priver notre message de sa signification humaine.
Si donc crier, c’est se décrier,  c’est parce que nous perdons alors notre statut de locuteur humain, pour prendre le mode d’expression de la bête.
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(1) On aura reconnu la devise olympique
(2) Procédé repris par un vieux film avec Fernandel, le Schpountz, où l’acteur fait ainsi varier l’expression « Tout condamné à mort aura la tête tranchée ») – si vous ne connaissez pas, c’est à voir ab-so-lu-ment : ici.

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