L'histoire est un roman qui a été ; le roman est de l'histoire qui aurait pu être.
Edmond de Goncourt
et Jules de Goncourt – Journal des Goncourt, 24 novembre 1861
On peut jouer sur le mot « histoire » mais
clairement cette citation n’a d’intérêt qu’à condition de prendre ce mot dans
le sens d’« évolution de l'humanité
à travers son passé, son présent, son avenir » (TLF)
1 – L'histoire est
un roman qui a été : ce qui veut dire que l’histoire du passé des
hommes suppose qu’un narrateur ait pris en charge le travail de mise en récit,
de transmission (que ce soit le soir à la veillée ou bien dans des ouvrages
savants). La conséquence pour nous, c’est que l’histoire que nous racontent les
historiens n’a pas été véritablement vécue par ceux qui ont participé aux évènements.
Que le 14 juillet 1789 par exemple, les parisiens n’aient pas su exactement ce
qu’ils faisaient ; que de toute façon, à Waterloo (voire même à Austerlitz)
les soldats n’aient pas vu – et donc pas su – comment tournait la bataille, ni le
rôle qu’ils y jouaient, etc…
Mais il se peut aussi qu’ils aient vécu quelque chose qui
était différent de ce que raconte le roman de l’histoire, quelque chose qu’on
peut encore aujourd’hui recueillir et raconter, mais qui ne rentrerait pas dans
le cadre de l’histoire. C’est sur cette base qu’a fonctionné l’Ecole des
Annales, avec ses études sur l’histoire des mentalités ou des mœurs.
« Entre
l’action et la pensée, il n’est pas de cloison. Il n’est pas de barrière. Il
faut que l’histoire cesse de vous apparaître comme une nécropole endormie, où
passent seules des ombres dépouillées de substance. Il faut que, dans le vieux
palais silencieux où elle sommeille, vous pénétriez, tout animés de la lutte,
tout couverts de la poussière du combat, du sang coagulé du monstre vaincu – et
qu’ouvrant les fenêtres toutes grandes, ranimant les lumières et rappelant le
bruit, vous réveilliez de votre vie à vous, de votre vie chaude et jeune, la
vie glacée de la Princesse endormie … » Lucien Febvre – Combats pour
l’Histoire.
La suite à demain … si vous le voulez bien !
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