- S’il faut mesurer
un philosophe par la barbe, les premiers qu’on louera ce sont les boucs.
Lucien – L’eunuque
Raphaël – l’Ecole d’Athènes (détail : Platon
et Aristote)
- Votre sexe n'est là que pour la dépendance: / Du côté de la barbe est
la toute-puissance.
Molière – L'école des femmes (Acte III,scène 2)
- La Providence
a mis du poil au menton des hommes pour qu'on puisse de loin les distinguer des
femmes.
Epictète
Aristote disait que la nature ne fait rien en vain. On
peut donc légitimement demander : à quoi sert la barbe ?
Là-dessus, deux réponses :
- celle
d’Epictète estimant que ce n’est rien de plus qu’un indice facilement repérable
pour distinguer un homme d’une femme.
- Ou
bien la barbe est l’indice du pouvoir, ce que Molière dit fort bien et que
Lucien met en débat à propos des philosophes. (Pour la barbe des Philosophes, voir
le détail du tableau ci-dessus)
Il était en effet interdit aux eunuques de faire des
études de philosophie, parce qu’ils étaient imberbes alors que le port de la
barbe était imposé aux étudiants-philosophes. Ce que conteste comme on le voit
Bagoas, lui-même eunuque, disant que le corps n’est en rien responsable des
facultés de l’esprit et que la barbe n’est rien d’autre qu’un symbole – et
encore ne devrait-on pas en être particulièrement fier puisque le bouc possède
une barbe plus fournie que celle de bien des hommes ! (1)
La barbe est donc un symbole qui a l’avantage (comme le
dit Epictète) d’être particulièrement visible. On sait qu’au 19ème
siècle les valets et les cochers étaient obligatoirement imberbes ; et que
certaines religions imposent le port de la barbe aux hommes (2).
Alors : pas de pouvoir sans cet indice qu'est la barbe ? Qu'en pensent donc les féministes ?
Certains vont ricaner : si les femmes veulent porter la barbe pour concurrencer les hommes, grand bien leur fasse !
Certains vont ricaner : si les femmes veulent porter la barbe pour concurrencer les hommes, grand bien leur fasse !
Et en effet, on a vu qu’autrefois, on exhibait les femmes
à barbe comme monstres dans les foires – et également que Sainte-Wilgeforte,
voulant conserver sa virginité obtint de Dieu le miracle d’une barbe qui lui
poussa en une nuit – repoussant du coup l’homme à qui on voulait la marier.
(Voir ce Post du 30-01-2011)
Je ne connais pas de féministes qui aient revendiqué pour
les femmes le port de la barbe (pourtant on maitrise assez bien les hormones qui leur permettrait de la faire
pousser) ; bien au contraire, elles la railleraient plutôt en tant que
symbole ridicule du pouvoir des hommes.
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(1) Texte complet : « Bagoas répondait qu'il ne
s'agissait pas de juger du corps, mais qu'il fallait examiner les facultés de
l'esprit, la connaissance des dogmes de l'école; et il invoquait le témoignage
d'Aristote, qui poussa son admiration pour l'eunuque Hermias, tyran d'Atarne,
jusqu'à lui sacrifier comme à un dieu (09). Il osa même ajouter qu'un eunuque
est bien plus propre qu'un autre à l'enseignement de la jeunesse, puisque son
état ne donne prise à aucune calomnie, et qu'on ne peut pas l'accuser, comme
Socrate, de corrompre les jeunes gens. Et comme son adversaire avait raillé son
menton imberbe, il lui répondit spirituellement, au moins le croyait-il:
"S'il faut juger des philosophes sur la barbe, le bouc a des droits
supérieurs à tous les autres." »
(2) A propos de la barbe du Prophète, voir ici.
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