Sur une arme les doigts noués / Pour agresser, serrer les
poings / Mais nos paumes sont pour aimer / Y'a pas de caresse en fermant les
mains
Jean-Jacques
Goldman – Nos mains
(La main) est pour ainsi dire un outil qui tient lieu des
autres.
Aristote – Les
parties des animaux, § 687b. (Lire ici)
o-o-o
Que faire de nos mains ?
- Presser la gâchette ?
- Ou alors
offrir une caresse
Louise brookes
Certes, la
main ouverte est un gage de paix : elle ne peut ni cacher, ni manipuler une
arme comme un couteau ou un pistolet. Mieux : elle ne peut frapper comme
le poing fermé. J’admets qu’elle peut gifler. Mais qu’est-ce qu’une gifle sinon
une caresse qui a mal tourné ? (1)
Pas
grand-chose à ajouter, sinon que la main ouverte est non seulement l’assurance
qu’on ne tient pas l’arme, mais qu’encore c’est au profit du frôlement de la
caresse qu’elle exclue sa manipulation.
Poursuivons :
la caresse s’oppose à l’action car la main ouverte perd tout emploi
pratique. Plus de pouce opposé aux autres doigts ; la main fermée assume
seule le rôle essentiel de la main : être un outil qui tient lieu des autres.
Mais remarquons en même temps que c’est dans le fonctionnement des doigts que
la main même vide est en elle-même un outil : fermée elle est marteau, ses
ongles sont des racloirs, ses doigts des pinces. Seule la main grande ouverte
est inactive, entendons qu’elle ne peut ni saisir, ni manipuler, ni écraser – mais
elle peut caresser.
Par la
caresse, la main existe pour elle-même : c’est sa chair, sa forme, sa
texture qui importent et qui agissent. Il y a sans doute des mains musculeuses
comme celles des masseurs. Mais justement : le massage suppose une
manipulation, il y a le masseur qui agit et le « massé » qui subit,
alors que le « caresseur » cherche une rencontre à égalité. La main
qui caresse reçoit en retour, du corps caressé, une autre caresse. Je ne veux pas
dire que si je caresse alors on va me caresser – encore que ce soit
possible ; mais plutôt que je ressens ma caresse donnée au corps de
l’autre comme une caresse reçue par ma main. Et c’est là peut-être que réside
le secret de la caresse heureuse.
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(1) J’en
entends qui murmurent. Ils disent qu’on dirait aussi bien qu’une caresse c’est
une gifle retenue ? Quel non sens ! L’élan et la violence de la gifle
suffit à en faire une réalité à part. Voyez ici
un florilège des « gifles
mémorables ».
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