Je ne sais si
cela se peut ; mais je sais bien que cela est.
Molière – L'amour médecin
On rapporte
qu'il (= Diogène le Cynique) toucha un mur pour prouver aux sophistes que le
mouvement existait ; le mouvement se démontre en marchant depuis lors.
Diogène Laërce – Vie des philosophes
illustres
Les faits sont têtus dit-on (1) : c’est même très
humiliant pour ceux qui ont construit de très belles théories pour prouver
qu’ils ne pouvaient se produire (qu’on songe aux théologiens face à Galilée). La
parade consiste alors de construire d’autres discours pour modifier la
perception des choses qui sont entrain d’apparaître. Mais rien ne sert de nier
la réalité : elle continue d’être la même, quoiqu’on en dise. Marx dit,
dans la 11ème thèse sur Feuerbach : Les philosophes n'ont
fait qu'interpréter le monde de différentes manières, ce qui importe c'est de
le transformer.
o-o-o
Tout cela est
bien connu, et il ne sert à rien d’ajouter l’évidence à l’évidence.
Quoique… N’y
aurait-il pas un domaine où la fausse perception entraînerait la modification
du réel ? Des évènements qui pourraient se produire simplement parce qu’on
a dit qu’ils le devaient ? Vous l’avez déjà deviné, n’est-ce pas : il
s’agit des prédictions auto-réalisatrices, celles qui déclenchent des réactions
qui vont produire dans la réalité l’apparition du le fait annoncé.
C’est ainsi
que cela se passe souvent dans le monde de la finance, lorsque tout le monde
vend ses actions quand on prédit une catastrophe – d’où la catastrophe,
justement. Mais il arrive aussi que cela produise l’inverse de ce qu’on
espérait : quand Alexis Tsipras annonce qu’il va mettre les Marchés à
genoux et rendre à la Nation sa souveraineté, les grecs, au lieu d’investir
leurs économies de leur pays censé remis à flot, vont retirer leur argent des
banques pour le mettre à l’abri – à l’étranger. Pas nouveau : un vieil
adage boursier dit qu’il faut vendre au son de clairon et acheter au son du
canon.
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(1) C’est
Lénine qui le dit (voir ici) : il est vrai que les bolcheviks de 1917
n’avaient pas besoin de discours pour faire la révolution. Ils cognaient.
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