Paul Ricœur –
Devenir capable, être reconnu
Selon Paul Ricœur la promesse nous engage dans un processus
indéfini où la promesse appelle une « proto-promesse », qui
bizarrement démultiplie des doutes qui ne font que s’additionner et non se
soustraire. C’est ainsi que dans certains questionnaires figure la
mention : « Je promets de
répondre avec sincérité aux questions qui vont suivre ». Et alors, comment
garantir que je m’engage « avec sincérité » ? Ne faut-il pas
aussi garantir la sincérité de mon engagement de sincérité – et ainsi
indéfiniment ?
On le devine c’est à la fonction performative du langage qu’on a ici affaire (Voir ici).
Sans entrer dans le détail, notons qu’Austin distingue
entre les énoncés qui engagent une action, ceux qui font ce qu’ils disent par
le fait même qu’ils sont prononcés, comme lorsque le Président du pays qui
accueille les Jeux Olympiques déclare lors de la cérémonie d’ouverture :
« Je déclare les Jeux de …
ouverts » ; et puis ceux qui engagent une action à venir :
« Je te promets que je t’emmènerai au cinéma demain. ». Il s’agit
d’une promesse c’est absolument vrai – mais ce qui est ainsi
« acté », c’est la promesse.
Mais rien dans l’énoncé ne constitue sa réalisation. Or, qu’est-ce donc qu’une
promesse dont on doute qu’elle soit sincère ? Nous revoici avec la thèse
de Ricœur : dans une telle situation, on est renvoyé de formule verbale en
formule verbale, ricochant de l’une vers l’autre, et cela indéfiniment :
on ne sortira jamais du processus verbal.
L’idée qui se dégage de cela est qu’il faut quand même
sortir du circuit du langage. Ne pas rester au niveau des promesses qui
s’emmanchent les unes les autres et confronter sa parole à la réalité. Sortir
de l’énoncé pour entrer dans le domaine de l’action. Comme on n’a pas forcément
le pouvoir de faire par la magie de la parole, il faut retrousser ses manches
et se taire.
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N.B. Je n’ai pas abordé la question du serment
amoureux : performatif ou pas ? Il est vrai que c’est là un sujet qui
a été abordé tellement souvent que je me sens dispensé d’y revenir.
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