Friday, September 18, 2015

Citation du 19 septembre 2015

Plaire à soi est orgueil ; aux autres, vanité.
Paul Valéry
Quelque vanité qu'on nous reproche, nous avons besoin quelquefois qu'on nous assure de notre mérite.
Vauvenargues
VANITÉ, subst. fém. Caractère d'une personne satisfaite d'elle-même et étalant complaisamment son plaisir de paraître.
TLF
Il arrive que nos auteurs dialoguent entre eux pardessus les siècles, s’entre-répondant sans même savoir qu’ils le font. Preuve que le monde des idées a une consistance bien supérieure à celle de certains actes humains. Ainsi de la vanité : délaissant le simple plaisir de paraître, la vanité apparaît ici comme lestée d’une charge affective autrement importante.
Pourrions-nous nous passer de la vanité ?
Selon Valéry, la vanité est l’autre face de l’orgueil, ce qui en fait un plaisir essentiel. Si l’orgueil est un défaut, il reste souvent un moteur essentiel de  notre activité. Comment accomplir une action sans tirer une jouissance de ce que l’on fait ? Du coup, la vanité se rehausse en venant jouer un rôle important dans notre vie. Alors, bien sûr, on peut objecter que l’orgueil et la vanité sont des plaisirs qu’on recherche pour eux mêmes, et peu importe à quel prix on les obtient. Peut-on être fier d’être adulé par les autres, si c’est au prix de sottises ? Car, c’est encore vanité que de jouir de l’adoration des sots !
Mais voici un correctif de Vauvenargues qui, délaissant le fouet du moraliste, entreprend de nous faire admettre des compromis face à la réalité de notre nature.
Oui, ce plaisir dont parle Valéry est vanité. Oui, il s’agit de s’exposer avec complaisance aux bravos de la foule. Oui encore, nous sommes peut-être prêts à bien des concessions pour l’obtenir. Mais la vanité est convoquée aussi pour nous récompenser de notre travail, et cette récompense, ou du moins l’espérance de l’obtenir est le « carburant » de la création. Je donnerai un exemple : on sait que Spinoza, du fait de la censure ne publia pas l’Ethique qui resta jusqu’à sa mort dans un tiroir. Certes il en fit sans doute des lectures partielles à des amis – tant qu’il en avait ; mais la lecture de l’Ethique dans sa singularité et dans sa systématicité exige bien autre chose qu’une de telle publicité. Cas exceptionnel que celui-ci, car, comment peut-on supporter d’avoir « enfanté » une œuvre pareille sans la produire à l’admiration des autres ?

On m’objectera sans doute que Descartes, qui n’eut pas de telles contraintes, fit circuler ses Méditations parmi les grands esprits de son temps, mais que ce n’était sûrement pas pour se faire admirer, mais pour dialoguer avec ces critiques avant de les publier. Mais que sait-on de l’intime sensibilité de Descartes ? Ecrivit-il tout seul dans son cabinet pour lui même ? Et alors pourquoi publier ?

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