On n’a pas
d’ordinateur ni de terrain de football pour s’occuper après la pêche ;
alors il reste le sexe.
Déclaration d’un pêcheur ougandais – Libé
du 18 mars 2016, page 15
Hier nous avions
demandé : que faire de notre vie pour qu’elle ne passe pas à compter des
jours trop lents à s’écouler ? Voici la réponse des pêcheurs africains.
Il arrive
qu’on regrette les époques, désormais lointaines, ou rien de ce qui fait nos
loisirs d’aujourd’hui n’existait. Ces villages ougandais semblent bien nous
donner tort : ils ne sont pas encore reliés au réseau électrique et les
voilà qui, privés de tous les loisirs modernes, s’ennuient très fort.
Si on déplore
que le progrès installe la télé au centre de la vie des foyers, c’est qu’on
suppose qu’auparavant, plein d’autres choses très intéressantes venaient occuper ce vide :
chez nous les veillées des chaumières, et en Afrique, les griots et leur récits
légendaires qui occupaient l’esprit et stimulaient les rêveries…
Seulement
voilà, de nos jours, en Ouganda, il n’y a pas encore de consoles de jeux, mais
déjà plus de griots ; comment cela s’est-il fait ? Je ne sais, mais
je retiens ceci, que notre pêcheur dit crûment : le seul loisir qui reste,
c’est le sexe. Au fond comme les bonobos, nous utilisons la sexualité pour
autre chose que la reproduction, mais différemment : alors que les bonobos
l’utilisent pour apaiser les conflits, nous l’utilisons pour passer le temps.
Et si c’était
vrai – non seulement pour ces pêcheurs africains mais aussi pour nous ? Je
veux dire : si la sexualité a tant d’importance aujourd’hui, ne serait-ce
pas simplement parce que nous n’avons pas grand chose d’autre à faire ?
On va
protester : le moment de réaliser l’acte-sexe est tellement bref que c’est
illusoire de vouloir « tuer le temps » en coïtant. Bien sûr… Mais
le « sexe » dont on parle englobe toute l’activité qui va avec :
les manœuvres de séduction, le temps consacré à se procurer les moyens de
rallier à notre projet une compagne (ou un compagnon), et après la chose faite,
remâcher les fantasmes qui viennent d’être ravivés et qui ne sont pas encore
refroidis.
Nous avions
hier demandé comment faire pour passer nos journées sans les perdre. La réponse
était je l’avoue un peu formelle, puisqu’on ne disait pas avec quoi les remplir
mais seulement comment procéder pour que ce soit le plus correct possible.
Voilà donc un élément de réponse : pour éviter de vous ennuyer, sexualisez
le temps.
On se
rappelle que Jésus demandait à ses fidèles « Qu’as-tu fait de ton
talent » (1). Sérieusement : selon la parabole notre vie valait ce
que vaut notre réponse – et si on répondait : « Seigneur, j’ai passé
ma vie à forniquer… » ?
Et ne venez
pas me casser les pieds avec la spiritualité, parce que je rappelle : la
parabole des talents ne nous invite pas tant que ça à spiritualiser notre
existence.
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(1) Nous
avions cité ce passage pour la 1ère fois le 23 janvier 2006 –
souvenir…
4 comments:
Et les pêcheuses africaines? Qu'en faites-vous?
Je suis toujours sidérée par votre côté homme... Pendant que monsieur est à la pêche, madame fait que tout soit fait comme il faut, même si la pêche fait vivre un peu le ménage... Quand parlerez-vous du talent des femmes... Je ne suis pas féministe- ceci dit, y'a des assocs qui valent, mais( merde, y'a un mais!) les citoyennes féministes rêvent surtout d'un gros pénis, faute de force,un peu jalouses...
Perso, je considère qu'il n'y a pas comparaisons possibles entre hommes et femmes, nous sommes si différents... regardez simplement le plumage des oiseaux- par exemple le plumage des paons mâles et celui de leurs femelles qui doivent passer inaperçues pour protéger leur progéniture..
Tuer le temps? Le temps ne pose pas bcp de problèmes aux femmes, sauf devant le miroir...
Je vous embrasse cher Jean-Pierre et bonne soirée :-)
Fany
et bien vous attirez la parole d'une femme bien remontée. ce texte est impressionnant mais j'avoue que j'apprécie sa sincérité et ce paysage d'un mode loin de nous qui nous raconte la vie là bas et pour les commentaires hommes femmes j'avoue que plus j'avance moins je sais et ce que je croyais à l'époque où je faisais ami amie avec l'homme je pense avec recul que c'était les années les plus fortes où je me sois trompée alors je lis, j'écoute mais me retire d'exprimer quoique ce soit , je ne sais plus.
je vous embrasse cher jean pierre et vous remercie de votre mot qui m'a fait plaisir et fait du bien.
je cherche encore ma joie mais je sens qu'elle se rapproche et ce va être un moment de fête.
A bientôt
Bonjour Fanny,
Bon : j’aurais pu répondre que ma source (l’article cité) ne donnait pas la parole aux mamans africaines et que c’est à lui qu’il faut adresser votre diatribe. Mais enfin, je relèverait quand même que vous avez déplacé le sujet : il s’agissait de parler non de ce que les _besoins naturels_ nous imposent, parce que n’est-ce pas, on n’a pas vraiment à choisir le moyen de les satisfaire. Il s’agissait des loisirs et du coup, puisqu’on parlait de l’Ouganda, on aurait pu dire aussi que, si les Mamans africaines n’ont rien à en dire, c’est tout bonnement parce qu’elles n’en ont pas : privilège masculin, n’est-ce pas ?
Mais, ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain – voyons un peu chez nous : y aurait-il donc chez les femmes des procédés pour faire passer le temps, qui seraient différents de ceux utilisés par les hommes ? Et qu’on ne place pas la polémique sur le plan du talent (combien de femmes chef d’orchestre ?) parce que je ne l’ai pas fait pour les messieurs.
Bonne réflexion,
Je vous embrasse,
Jean-Pierre
Chère Frankie,
il y a des féministes qui sont sympa, et puis celles qui sont un peu casse-pieds (bien sûr, je ne dis pas ça pour Fanny), ce sont celles qui estiment que la lutte homme/femme reste déterminée par le sexe et non par la niveau d’évolution de la société. En 1970, j’ai été l’un des premiers papas à mettre son bébé dans un caddy de super-marché. Voyez maintenant combien sont à faire ça…
Alors bien sûr quand une société évolue, tout le monde n’évolue pas en même temps : j’ai eu la surprise d’avoir l’impression, en allant du côté de l’Aveyron de reculer de 50 ans. Mais qu’on sache quand même qu’on ne fera pas le chemin en sens inverse.
Je vous embrasse chère Frankie,
Jean-Pierre
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