A la surface du globe, pour la matière vivante en général,
l'énergie est toujours en excès, la question est toujours posée en termes de
luxe, le choix est limité au mode de dilapidation des richesses.
Georges
Bataille – La Part maudite (1949)
Spécial nostalgie. –
Bataille écrivait La
part maudite en 1949 : c’était l’époque où l’idée de milieu écologique
comme milieu où la vie, sous toutes ses formes, équilibre ses besoins et ses
produits, n’effleurait pas les cerveaux.
Ah !... 1949… La belle époque, celle où le seul souci
était de trouver des richesses à dilapider et non à économiser. L’économie des
moyens c’était bon pour les pauvres, les malheureux. Les autres, ceux qui
espéraient quelque chose de la vie n’avaient qu’un espoir, celui de trouver de
quoi s’offrir une grosse voiture à remplir de belles filles et un bateau
surpuissant pour déchirer la mer.
1949 : après la guerre, la paix – l’espoir n’était
pas d’épargner, mais de gaspiller les richesses, et peu importait qu’elles ne
fussent pas renouvelables.
Comme un bon philosophe, Bataille rattache ce désir à une
tendance fondamentale de la vie : la matière vivante est déséquilibre,
elle est un luxe qui dilapide des richesses au lieu des les stocker en vue de
leur réemploi. Les être vivants ont pu apparaître sur terre en tirant l’énergie
du soleil, et jamais ils ne se sont demandé si un jour il finirait par
s’éteindre.
Quant à nous, qui venions juste de naitre, nous allions
bientôt trouver dans notre milieu une expression pour discréditer la tendance à
l’économie : « souci de petit bourgeois, de petit boutiquier pour qui
tout ce qui se fait doit être traduit en argent qu’on peut compter, économiser,
thésauriser. »
Metsys
– Le préteur et sa femme (Musée du Louvres)
Devenu un peu plus grands, nous avons eu la possibilité de
marier Marx et Nietzsche, le critique inflexible de l’« homme aux écus » et le philosophe de la volonté de puissance qui se dépense sans compter. A la jouissance de l’ascète
qui retient sa semence en se tenant loin des femmes, là-bas, dans le désert,
nous préférions les caves de saint Germain-des-Prés où nos parents dansaient le
bebop, avant d’aller faire des petits baby-boomers sans y songer…
La
suite à demain, si vous le voulez bien.
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