Tuesday, September 06, 2016

Citation du 7 septembre 2016

Le terme de "régression" n'implique pas une philosophie évolutionniste de l'histoire mais la référence aux objectifs que se donnent les peuples et même les doctrinaires (…)
Raymond Aron – Une histoire du XXe siècle
Contrairement à Valéry qui affirmait « L’histoire est le produit le plus dangereux… » (1) parce qu’elle évoque les époques héroïques que les peuples rêvent de revivre (comme de revenir à l’empire romain, avec Mussolini), Aron tient à distinguer entre l’histoire véritable et les idéologies qui font délirer les peuples. L’idée de Raymond Aron est que, contrairement à celles-ci, l’histoire ne régresse pas, ne fait jamais machine arrière, mais que, par contre, ce sont les objectifs avoués des hommes qui le font.
Autrement dit, entre les buts poursuivis par certains peuples et la réalité qui se façonne dans l’histoire, l’écart peut être gigantesque. Ce n’est pas une idée nouvelle, Hegel le disait déjà : les hommes suivent leurs passions, mais l’histoire n’enregistre que le fil rationnel de leurs effets ; et Marx disant « Ce sont les hommes qui font l’histoire mais ils ne savent pas qu’ils la font ».
Et si l’erreur dénoncée par Raymond Aron était plus vaste qu’il ne le dit. Si non seulement on ne pouvait revenir en arrière, mais si aussi  on ne pouvait faire de bond en avant ?
Prenons l’exemple de l’Espace Schengen, dont on dit qu’il est désormais en ruine : l’erreur n’a-t-elle pas été de croire que ce vaste territoire sans frontières était issu de pays qui avaient enterré leurs particularismes et leurs nationalismes pour ne révérer que le Dieu euro ?


Mais peut-être n’y a-t-il eu que résurgence de ce qui n’avait pas disparu, mais s’était juste éclipsé – à savoir la persistance des Etats-nations, chacun étant en lutte perpétuelle contre ses voisins ? Déjà la Grande Bretagne a choisi de retrouver sa souveraineté nationale en quittant l’Europe Unie. Déjà lors de la réunification des deux Allemagnes, on a tremblé de voir renaitre le Grand Reich germanique. Et demain ? L’Empire Austro-hongrois ? L’Empire napoléonien ? A moins qu’on n’ait affaire à celui de Charles Quint ou d’Auguste ?
Toute la question est de savoir, non pas s’il y a illusion, mais où elle se cache ?
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(1) « L’Histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l’intellect ait élaboré. Ses propriétés sont bien connues. Il fait rêver, il enivre les peuples, leur engendre de faux souvenirs, exagère leurs réflexes, entretient leurs vieilles plaies, les tourmente dans leur repos, les conduit au délire des grandeurs ou à celui de la persécution, et rend les nations amères, superbes,  insupportables et vaines. » Paul Valéry – Regards sur le monde actuel.

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