La conquête du superflu donne une excitation spirituelle
plus grande que la conquête du nécessaire. – L'homme est une création du désir,
non pas une création du besoin.
Bachelard
– La Psychanalyse du feu
On a dit bien souvent que le luxe était un penchant pervers
des civilisations en décadence, et qu’il avait accompagné l’empire romain tout
au long de son écroulement. On ajoute aussi aujourd’hui que le superflu est
incompatible avec les capacités de la planète à nourrir quelques milliards
d’hommes : il faudra un jour accepter ce principe « Pour jouir
longtemps il faut renoncer à notre aspiration au superflu ».
Le philosophe aime soumettre de tels principes à
contradiction. Ici, Bachelard nous en propose une : la recherche du superflu,
objet du désir et non du besoin, a soutenu le progrès de l’humanité. Certes, si
l’espèce humaine avait su se contenter de l’indispensable, boire l’eau du
torrent, pécher la truite juste pour sa faim et dormir dans l’anfractuosité
d’un rocher, alors l’ours serait toujours niché au creux des cavernes, et les
abeilles industrieuses ne périraient pas empoisonnées par les pesticides.
Oui, mais : si au lieu de causer notre perte le goût du
luxe était consubstantiel à notre nature et nous avait propulsé en avant, vers
des nouvelles façons de jouir de la vie ? Rêverie de philosophe ?
Peut-être pas. Je lis en effet que lors du métissage inter-espèces (1), le
sapiens a gagné des facultés venues des espèces concurrentes, et qu’ainsi
« en Papouasie-Nouvelle-Guinée un
gène hominidé de Denisova permet aux Papous de détecter des parfums très
subtils » (Art Wiki.) J’imagine ce métis moitié denisovien moitié
sapiens inaugurant ce gène en partant à la découverte du monde pour satisfaire
son désir de parfum…
Pour comprendre l’issue de cette quête odorante, lisez donc Le traité des sensations de Condillac. (À
télécharger ici)
---------------------------------
(1) La découverte faite récemment d’un crâne de sapiens
vieux de 300000 ans au Maroc semble confirmer cette hypothèse : oui, le
sapiens a été contemporain de l’homme de Neandertal et de celui de Denisova.
Mais ces espèces avant de s’éteindre ont coexisté assez longtemps avec notre
espèce pour lui léguer par métissages quelques gènes.
No comments:
Post a Comment