Personne ne peut imaginer qu’un texte va rendre quelqu’un
vertueux.
François
Bayrou
La vertu peut-elle s’enseigner ? Ce thème du Protagoras de Platon pourrait bien être
un sujet pour le bac de philo que nos enfants vont bientôt passer. Lesquels à
n’en pas douter auront cette remarque de François Bayrou dans la mémoire. (1)
Mais attention !
Ce n’est pas parce qu’un ministre a dit une pareille chose que c’est
nécessairement vrai – ni nécessairement faux d’ailleurs.
C’est pourtant un thème si récurrent en philosophie morale
et politique qu’on se doute bien qu’on ne peut trouver de réponse définitive pour
trancher cette question – d’ailleurs, comme on le sait, le Protagoras ne résout pas le problème.
- On donne certes des cours de morale : mais quand à
rendre les gens vertueux, on ne s’imagine pas vraiment y parvenir ainsi. Ainsi Bergson
parlait-il de deux formes de morales : l’une faite de contraintes (la
morale close) et l’autre faite de l’exemple du
héros ou du saint qui donnait à ceux qui les observaient le désir de les
imiter (la morale ouverte). Dans le premier cas, on apprend certes le respect
des coups de trique, mais pas celui des valeurs. Dans le second, seul l’élan de
l’âme peut produire quelque chose.
- Certains ont cru que, certes la morale ne pouvait
s’enseigner, mais qu’il n’est pas non plus nécessaire de le tenter, parce
qu’une justice immanente se charge de punir les méchants. Tu ne l’emporteras pas au Paradis ! dit-on – sous
entendu : peut-être que dans ce monde ta méchanceté ne sera pas punie,
mais en enfer tu vas subir les justes châtiments de tes crimes.
- Toutefois on le sait : mieux vaut prévenir le crime
que le punir. D’où l’idée de faire des lois punissant l’immoralité – particulièrement
en matière de gouvernance politique. Intéressant, d’autant qu’un tel texte doit
nous révéler ce qui peut corrompre l’action des hommes qui gouvernent. Ainsi de
ce qu’on appel « les conflits
d’intérêts », concernant la gestion de plusieurs intérêts qui
s’opposent comme l’intérêt privé et intérêt général, soumis à interdiction,
visant à prévenir l’éventuel corruption des décisions prises dans l’intérêt
général.
On devine en quoi consisterait une loi pour « moraliser » la vie
publique (2) : agir sur le ressort de la récompense et du châtiment,
conditionnant l’action humaine au même titre que le dressage animal. Ce n’est
certes pas très glorieux ; mais c’est le résultat qui compte.
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(1) Ceux qui voudront réviser liront ceci.
(2) Comme on le sait François Bayrou a lui-même récusé cette
expression par la citation que nous venons de citer, lui préférant la
formule : « Loi pour la
confiance dans notre vie démocratique » (lu ici). La loi ne peut induire une attitude morale, mais par
contre, elle peut susciter une réaction psychologique.
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