if a clod be washed away by the sea, Europe / is the less, as well as if a promontory
were, as / well as any manner of thy
friends or of thine / own were ;
(…)
Traduction : Si
la mer emporte une motte de terre, l’Europe en est amoindrie, comme si les
flots avaient emporté un promontoire, le manoir de tes amis ou le tien
John
Donne (1624) – Méditation XVII (1)
Commentaire
II
Je
prendrai trois vues successives sur ce court poème, dont chacun connaît la fin
grâce au livre d’Hemingway, mais qui porte bien d’autres éléments auxquels nous
réagissons spécialement. Voici
donc la seconde :
John Donne est-il toujours lu en Grande-Bretagne ? On
peut en douter au vu des actualités qui agitent la chronique. Après la crise
des migrants (cf. Post d’hier), dont les Anglais persistent à refuser de croire
qu’étant Erythréens, Syriens ou Pakistanais, ils sont néanmoins des hommes
comme tous les autres – voici le Brexit.
- Ne croyez pas, dit John Donne, que l’Europe sans la
Grande-Bretagne ce soit toujours la même Europe (rappelons que nous sommes en
1624). Si petit que soit ce territoire, il a autant d’importance que le manoir
ou la propriété la plus importante qu’on puisse concevoir – et quand bien
même il ne serait qu’une motte de terre désagrégée par la mer, sa perte serait
sans remède. Les dimensions importent peu, il n’y a pas de petites pertes,
elles s’équivalent toutes, solidaires qu’elles sont du même tout.
Brexit : On admettra facilement que cet avertissement
vaille pour les anglais bien qu’il semble adressé aux européens : la réversibilité
est la règle, puisqu’eux et nous sommes à égalité. De plus, il n’y a pas de jeu
gagnant/perdant et encore moins gagnant/gagnant : il n’y a que du
perdant/perdant. Oui, amis british, vos poètes vous en avertissent : si
vous commencez à couper les ponts avec le continent, vous allez vers l’oubli de
votre nature réelle, et à considérer que votre île soit incommensurable au
monde qui l’entoure, vous allez vous persuader que la perte de celui-ci est une petite chose,
comparée à ce que vous êtes.
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(1) Poème à lire ici – Traduction :
« Aucun homme n’est une île, un tout, complet en soi ;
tout homme est un fragment du continent, une partie de l’ensemble ; si la mer
emporte une motte de terre, l’Europe en est amoindrie, comme si les flots
avaient emporté un promontoire, le manoir de tes amis ou le tien ; la mort de
tout homme me diminue, parce que j’appartiens au genre humain ; aussi n’envoie
jamais demander pour qui sonne le glas : c’est pour toi qu’il sonne. » John
Donne
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