« A force d'expliquer l'inexplicable, notre pays en est venu à excuser l'inexcusable. »
Nicolas Sarkozy Ministre de l’intérieur - 2ème séance du mardi 8 novembre 2005
Règle numéro un : se méfier des belles formules. Elles ne sont pas forcément fausses ; mais elles ne sont pas vraies simplement parce qu’elles sont belles.
Application : doit on croire qu’expliquer ce qui ne peut l’être conduit à excuser ce qui ne doit pas l’être ? Ceci ne fonctionne que si on admet qu’expliquer c’est excuser, et que comprendre les causes d’un acte, c’est du même coup pardonner la faute qu’on a commise.
Mais on est dans deux registres différents : d’un côté on est dans la causalité mécanique (j’ai glissé, je suis tombé, entraînant dans ma chute celle du vase qui s’est brisé) ; de l’autre on est dans celui de la responsabilité liée à la volonté donc au choix libre. Ainsi, la faute m’incombe en tant que j’ai voulu le mal que j’ai fait. A la rigueur on peut dire que je suis responsable de l’accident que j’ai produit (cassé la vase), parce que j’aurais dû le prévoir et donc vouloir l’éviter (l’enfant a cassé le vase, parce qu’il courait trop vite ; il savait bien pourtant, on lui avait dit mille fois de ne pas courir en traversant le salon ciré).
On objectera peut-être que c’est le ressort habituel de la plaidoirie des avocats que d’excuser leur client en faisant état de leur enfance maltraitée, ou des misères qu’une société injuste leur a infligées. Sans doute. Mais c’est que justement, ils plaident l’irresponsabilité, qui consiste à déplacer l’origine de la faute de celui qui a agi sur ce qui a déterminé à agir. Alors, ce n’est absolument pas une excuse, sauf à admettre qu’elle ne constitue pas un pardon : pardonner, ça veut dire : « continuons à vivre ensemble » ; excuser voudrait dire : « tu n’es qu’on pauvre irresponsable, il va falloir te soigner si tu veux continuer à vivre avec nous. »
Mais après tout c’est peut-être cela que voulait dire le ministre.
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