Toute révolution devrait commencer par une réforme du dictionnaire.
Victor Hugo
J’avoue que je n’ai pas le contexte de cette citation et que telle quelle elle surprend un peu…
Néanmoins, on peut lui donner du sens :
- D’abord, admettons que les révolutions, les vraies, créent une réalité nouvelle que le langage doit prendre en charge. L’idée est alors que la réalité n’existe vraiment que quand elle est présente dans le vocabulaire, et manipulable par la pensée.
D’ailleurs tous ceux qui prétendent révolutionner la société opèrent de même : ils introduisent des mots nouveaux, voire même des nouvelles tournures de phrases dans le parler de tous les jours. Les journalistes appellent ça la langue de bois, les autres parlent plus volontiers avec Orwell de novlangue – ou de double langue.
- On ne peut néanmoins éliminer la possibilité que Victor Hugo ne parle ici qu’au premier degré : la réforme du dictionnaire serait la condition de tout révolution (et non sa conséquence comme on vient de l’imaginer).
Réformer le dictionnaire, c’est aussi réformer la pensée si tant est que la pensée n’existe que par son expression (on ne pense pas exactement de la même façon en français, en anglais, en allemand ou en grec : tous les philosophes vous le diront (1)).
Disons donc que la révolution politique n’est possible que si des hommes ont compris ce qu’est la nouveauté pour la quelle ils se battent et se préparent à mourir.
Un exemple ? Prenez la liberté – ou mieux : le bonheur. Voilà deux valeurs sans les quelles la révolution française n’aurait pas eu lieu.
Or chez les romains, le liberté était une condition sociale, et nul n’aurait fait la révolution pour la conquérir (2).
Et le bonheur ? Au XVIIème siècle, on n’aurait pas fait la révolution pour que la société inscrive ce but dans sont droit. Car alors, le but de toute vie était la grâce divine, ou si vous voulez la vie éternelle.
Allez vous faire la révolution pour conquérir votre part de Paradis ?
(1) Je pense en particulier à Heidegger.
(2) Et Spartacus me direz-vous ? Il a voulu affranchir les esclaves, mais essentiellement pour les faire changer de condition. Qui sait si au cas où leur révolution avait réussi ils n’auraient pas eu eux-mêmes des esclaves ? Rappelons que bien des révolutionnaires de 89 ont eu des propriétés aux Antilles avec des esclaves qu’ils se sont bien gardés d’affranchir.
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