L'esprit éminemment faux est celui qui ne sent jamais qu'il s'égare.
Joseph JOUBERT – Carnets (11 octobre 1815)
L’homme qui pense juste n’est pas celui qui ne s’égare jamais ; il est celui qui corrige ses erreurs.
Celui qui pense faux est celui qui est persuadé de penser juste – et qui ne vérifie par parce qu’il estime que sa confiance suffit à prouver l’exactitude de sa pensée.
Disons-le autrement : l’erreur est humaine, mais persévérer dans l’erreur est diabolique (= c’est une faute), dit le proverbe. L’esprit éminemment faux est celui qui se trompe parce qu’il ne vérifie pas qu’il ne soit pas justement entrain de se tromper.
Quant à celui qui pense vrai (plutôt que juste) mais qui n’a pas la faculté de douter de ses certitudes premières, Platon disait que c’est l’homme de l’opinion droite ; et il expliquait ainsi l’opinion droite : c’est un aveugle qui marche sur la route et qui ne tombe pas dans le fossé simplement parce que la route est momentanément droite. L’opinion droite est dans la vérité, mais on ne sait ni pourquoi ni pour combien de temps.
On dira que la qualité de l’esprit éminemment vrai est la modestie, puisqu’il faut accepter de se voir démenti.
Oui, bien sûr. Mais je crois aussi que c’est un esprit qui n’est pas narcissique. Car souvent nos pensées sont comme nos enfants chéris que nous aimons, même s’ils sont bancals ou s’ils on un chromosome de trop. Ma pensée est fausse… oui, mais c’est la mienne, elle m’exprime, elle est moi-même. Comme si la vérité avait pour fonction d’exprimer la nature d’un individu !
Evidemment, toute pensée n’a pas à être vraie : elle peut être esthétique, et donc belle ; elle peut être poétique, et donc créer quelque sens nouveau ; elle peut être politique et donc contribuer à changer le monde.
Mais si elle est « scientifique » (au sens large, évidemment) elle ne tient qu’en démontrant qu’elle est vraie.
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