Thursday, October 22, 2009

Citation du 23 octobre 2009

L’odeur d’un corps, c’est ce corps lui-même que nous aspirons par la bouche et le nez, que nous possédons d’un seul coup, comme sa substance plus secrète et, pour tout dire, sa nature. L’odeur en moi, c’est la fusion du corps de l’autre à mon corps

Sartre – Baudelaire p. 221

Première remarque, Sartre ne parle ici que de l’odeur corporelle, celle de l’être humain, sans faire le distinguo que nous avons si souvent relevé entre l’odeur des hommes et la parfum des femmes.

Deuxième remarque, il considère l’odeur comme une émanation – ce qu’elle est effectivement – et non comme un signe abstrait. Pour sentir le chocolat, il faut qu’il soit diffusé par du chocolat véritable, ce qui distingue l’odorat de certains autres sens qui peuvent fonctionner à partir de signes abstraits (la vue, l’ouïe qui peuvent se contenter de l’image ou de l’enregistrement sonore).

Troisième remarque, l’odeur d’une être humain n’est pas seulement une émanation quelconque de son corps ; l’odeur d’un corps, c’est ce corps lui-même. Ce qui nous permet ajoute-t-il au cas où on n’aurait pas bien aperçu la conséquence, de le posséder d’un seul coup.

On imaginerait que c’est à propos de la sexualité ou du moins de la sensualité que Sartre évoque cette particularité de la possession du corps humain. Mais non. Il commente un passage de Baudelaire, (1) où le parfum distille l’être au compte goutte pourrait-on dire, faisant de la présence quelque chose d’évanescent.

Le parfum a une propriété quasi-métaphysique, celle de nous donner l’être à travers une présence « shuntée », allégée, allusive. Allusive, oui – mais présence quand même.

Un peu comme si, montant l’escalier et sentant un parfum léger qui flotte dans l’air, on se disait : « C’est elle ! Elle est passée par là… »

Allons bon ! Voilà que c’est moi qui fantasme à présent…


(1) Mainte fleur épanche à regret / Son parfum doux comme un secret / Dans les solitudes profondes. Le guignon (Les fleurs du mal)

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