Le chapon. - Je me souviens bien d’avoir entendu
clairement qu’il y a bien des pays, et entre autres celui des Juifs, où les
hommes se sont quelquefois mangés les uns les autres.
La poularde. - Passe pour cela. Il est juste
qu’une espèce si perverse se dévore elle-même, et que la terre soit purgée de cette
race.
Voltaire – Dialogue duchapon et de la poularde (1763)
Passons nous aussi sur le sens qu’il faut
donner à l’antisémitisme féroce de ce dialogue : disons simplement que selon
toute apparence il faut prendre cet échange entre le chapon et la poularde au
second degré, ce conte philosophique de Voltaire d’où il est extrait étant
écrit sur le mode ironique.
Non, je préfère quand à moi insister sur un aspect
incontestable : l’horreur et la barbarie dans une société humaine est pour
nous caractérisée par l’anthropophagie. Je serai tenté de dire que si on
impute aux Juifs ce crime ce n’est pas qu’on y croie vraiment, mais plutôt pour
caractériser l’horreur qu’ils inspirent. Puisque le Juifs sont abominables,
alors ils doivent bien commettre des crimes abominables et donc se manger les
uns les autres (1).
Voilà donc mon interrogation : qu’est-ce qui fait que
l’anthropophagie apparaisse comme ce crime suprême, au point que depuis l’antiquité
grecque il est pris comme indépassable ?
- Je dirai que cette horreur est bien un fait de
civilisation et qu’il n’est pas considéré comme tel partout et ceux qui ont lu
la Chronique des Indiens Guayaki de Pierre Clastres savent que ceux-ci
dévoraient leurs morts avec une belle gourmandise. De là à les retrouver sur marmiton.org…
Plus près de nous, on trouve sur cet excellent Blog,
l’anecdote suivante : « Georges Clemenceau rapporte qu'à la fin du XIXe siècle,
on trouvait sur les marchés d'Afrique équatoriale des individus, hommes et
femmes, sur lesquels chacun marquait le morceau qu'il désirait acheter pour
manger. Lorsque tout était vendu, la personne était abattue, découpée, et les
morceaux distribués aux acheteurs. »
Encore plus proche de nous ? A-t-on trouvé expression
plus féroce de la haine que cette exclamation d’un de nos dirigeant, s’écriant
qu’il souhaitait voir son ennemi intime pendu à un croc de boucher
?
A quand le dépeçage ?
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(1)
On a observé le même procédé lors du procès des Templiers, avec les accusations
de profanation et de sodomie.
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