Cela nous paraît extraordinaire aujourd’hui, mais le fait
d’être plus cultivé que d’autres était considéré comme un bien en soi.
Claude Lelièvre –
Interview Supplément Jeunes diplômés Libération 30 avril 2012
C’est un poncif, que les vieux sont aigris, qu’ils
regrettent le temps de leur jeunesse et qu’ils pensent que l’Histoire a pris un
bien dangereux virage…
Eh bien moi, en lisant cet article dont j’ai extrait
cette citation, je me sens bien vieux.
Voilà pourquoi :
Il fut un temps où le métier et l’école n’allaient pas nécessairement
de pair. Réussir à l’école et obtenir un emploi n’avaient – au 19ème
siècle – rien de commun, au point que l’obtention du Certificat d’études
n’était absolument pas requise pour trouver un travail (1). Les études ainsi
que les diplômes avaient pour office de produire une personnalité cultivée,
bien sûr selon des critères bien définis, et non pas un apprenti prêt à l’emploi.
Alors, certes, je n’ai pas connu cette époque. Pourtant on
en trouvait encore la trace dans les années 1960, quand on faisait des études
« supérieures » : les diplômés de l’université étaient certes
favorisés pour obtenir un emploi, mais bien souvent une licence de n’importe
quoi était un viatique suffisant pour arriver sur le marché du travail. Alors on faisait des études de lettres, de
philosophie, de science humaine, et puis on devenait – peut-être par malchance
– employé de banque. Mais au moins on
avait un travail et on avait fait des études qui nous passionnaient.
Claude Lelièvre explique comment il se fait que les
diplômes soient devenus strictement nécessaire pour l’emploi, et comment
réciproquement ils finissent par
n’exister que pour ça.
Et c’est là que je me sens bien vieux : quand les
études ne servent qu’à « former » et non à éduquer – des travailleurs
et non des hommes ; quand le terme d’humanités (au pluriel) ne signifie
plus rien du tout…
… et quand les hommes sont devenus comme le dit Marcuse –
unidimensionnels.
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(1) D’ailleurs, sans cela on ne comprendrait pas pourquoi
le taux de réussite au Certificat était si faible : de 25 à 30% en 1900,
pas plus de 50% avant la seconde guerre mondiale. On pourra lire l’intéressant
article de Wikipédia ici.
1 comment:
voilà encore un billet qui me ravive et je découvre un auteur que je ne connais pas. nos humanités !!!
si vous étes viellots , je suis vieillote
merci jean pierre
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