Sunday, September 29, 2013

Citation du 30 septembre 2013



Nous ne savons pas en vérité ce que sont les mondes. Mais nous pouvons guetter les signes de leur fin.
Jérôme Ferrari – Le sermon sur la chute de Rome (éd. de poche Babel, p. 198)
On perçoit plus facilement le changement que l’immobilité. C’est ainsi que nous ne connaissons pas vraiment le monde que nous habitons, mais  nous pourrons savoir quand et comment il s’abîmera dans le néant.
Il y a plusieurs façons de concevoir les signes à guetter :
- la façon Apocalypse : éclairs, tremblements de terre, trompettes du Jugement dernier, cavaliers semant la maladie et la mort, etc… (1)
- et puis il y a la façon « forêt tropicale », avec son lent pourrissement dans la touffeur humide et pestilentielle de l’air. La mort y est lente mais assurée. On meurt en croupissant.
Brrrrr ! Ça, c’est la façon Jérôme Ferrari : dans son village Corse, point de touffeur humide, pas de serpents ou de scorpions insinués dans la chaussure du matin. Mais de l’immobilité, de la solitude, et surtout la certitude que rien ne changera sinon par l'effet d'une inexorable décrépitude : ce monde est vieux, et il ne risque pas de rajeunir.
Autrement dit et pour corriger ce que nous disions plus haut, il peut se faire que l’immobilité devienne perceptible, mais alors elle a l’aspect de la mort.
Question : la Corse de Ferrari n’est-elle pas l’image de la France dans son ensemble ? Cessant d’être une ile, n’est-elle pas en train de conquérir de l’espace, jusqu’aux frontières de l’Hexagone ?
Re-Brrrrrrr…. Comment échapper au désespoir ?
Réponse : grâce à saint Augustin et à son Sermon sur le sac de Rome. Augustin reprend le stoïcisme en remplaçant la Nature par Dieu : inutile de nous révolter contre ce que Dieu a voulu de toute éternité. Il nous a voulu périssables, certes, mais il veut aussi que le monde dans lequel nous vivons soit également périssable : reconnaissons-le, et louons Dieu de nous permettre, par les souffrances qu’il nous inflige,  de racheter nos péchés (2).
Re-Re-Brrrrrrrrrrrr… Comment notre époque moderne qui délaisse Dieu et le péché parviendra-t-elle à éviter ces effrois de fin du monde ?
Réponse : en changeant, en bougeant, autrement dit : en réformant.
Et nous revoilà en plein discours politique : ça au moins, ça ne change pas.
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(1) Voir la gravure de Dürer ici.
(2) Saint Augustin répond ainsi au sentiment de révolte des fidèles : « Pourquoi Dieu frappe-t-il la Rome chrétienne alors qu’il a laissé intacte en son temps la Rome païenne ? »

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