Vouloir édifier l'avenir à l'imitation du passé, quelle
coupable folie!...
André
Gide – Journal 1889-1939, 14 février 1932
On peut lire cette citation écrite en 1932 en lui donnant un sens
restreint : préparer la prochaine guerre en construisant des
fortification, c’est à dire en croyant qu’on aura une guerre de position comme
en 14 – quelle coupable folie!...
Mais on peut aussi songer au mouvement actuel qui préconise
pour la France un retour aux sources (aux fondamentaux
comme on dit aujourd’hui) : aux racines chrétiennes de la France ; à l’autorité
du père, à celle du curé, du pouvoir millénaire des hommes sur les femmes, du
rôle dévolue à celles-ci de materner les enfants, de gérer le foyer etc… Ceux
qui ont eu le cran de lire jusqu’au bout le livre d’Eric Zemmour, (et qui n’ont
pas été terrassés avant de le finir par un coup de tension) l’auront
reconnu : il s’agit bien de cette attitude qui consiste à voir dans le
passé – le long, le très long passé – la garantie de la valeur de la
civilisation. Ce qui a été fait et réussi durant des millénaires doit être
conservé et reproduit encore et encore.
Bien entendu, ces penseurs excluent le progrès : il est
le mal qui consiste à croire que l’avenir nous rapproche d’un mieux, d’un but
poursuivi par l’humanité depuis son origine – alors qu’il ne fait que nous en
éloigner, affaiblissant en nous la source originelle où nous puisions notre
force.
Oui, renier l’avenir et le progrès : quelle coupable folie ! Ces fous voient en
l’avenir le risque de dégénérescence de l’humanité, alors que, nous autres, hommes
raisonnables, savons qu’elle n’a pu survivre qu’en se transformant pour s’adapter,
comme toute espèce vivante, à son milieu et à ses changements, usant de ressources
culturelles là où les autres espèces
n’ont à leur disposition que des mutations biologiques.
Ne soyons donc pas du côté des fous, même s’il leur arrive d’être
séduisants. Mais songeons que s’ils séduisent, c’est parce que les progrès ne
sont pas systématiquement bons. Ricœur disait : le progrès, c’est un plus qui est aussi un mieux : évitons donc le plus quand
on ne sait pas faire mieux.
On l’a dit, le progrès se reconnaît à ce qu’il poursuit les
mêmes buts depuis l’origine de l’humanité – comme se conserver, se
reproduire et puis dessiner ou peindre ce
qu’elle imagine :
Un
cerf à Lascaux
Et comme on le voit, faire du nouveau certes est tentant,
mais faire mieux n’est pas toujours facile
1 comment:
post très convainquant , je n'ai pas lu Zemour merci de l'avoir fait pour nous. merci de ce juste si juste billet. Il nous faut penser ne pas oublier et reveiller ceux qu'ils mis sous l'oreiller et sans argent de la souris on laisse sous l'oreiller leur aplication penser chaque jour rêver chaque nuit.
je vous embrasse cher Jean pierre
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