La religion en tant que source de consolation est un
obstacle à la véritable foi, et en ce sens l'athéisme est une purification.
Simone
Weil – Cahier II
On se dit que cette phrase sur la religion (« obstacle à la véritable foi ») et l’athéisme
(= « une purification »),
c’est « du grand n’importe quoi », et que celle qui l’a écrite ou bien
ne savait plus ce qu’elle faisait, ou bien s’ingéniait à prendre à rebours le
bon sens pour se faire remarquer.
Pourtant, ne dit-on pas aussi que le vraie religion n’est
atteinte qu’après bien des tâtonnements, que les saints ont du vaincre la
tentation du démon, et chasser de leur âme les débauches de la jeunesse (cf. Les Confessions de saint Augustin, sans
rien dire des tentations de saint Antoine) ? Oui, Simone Weil a simplement
donné un tour absolu et donc paradoxal à une révélation contenue dans la vie
exemplaire des plus grands saints. Elle a insisté sur la première partie de ce
cheminement, l’athéisme, qui apparaît du coup comme un moyen et non comme une
fin – comme une étape et non comme le but situé à l’arrivée. Plutôt que la
consolation d’une religion dont il suffirait de respecter les obligations
(quiétisme), choisissons l’inconfort de l’athée qui doit se mesurer aux défis
de la vie morale sans Dieu.
L'athéisme
est /donc/ une purification. Bon – Mais quand même : de
quelle purification parlons nous ? Peut-être de celle de la créature
perdue dans les ténèbres que ses yeux ne peuvent percer et qui reconnaît que
son orgueil la mène à sa perte ? Ou celle de Woody Allen (cf. ici),
gémissant devant l’inanité d’une vie sans au-delà ?
A moins que… cet athée soit le Surhomme nietzschéen qui
découvre qu’il est possible, une fois surmontés son amour des vieux Dieux et des
idoles, d’avoir foi en lui même et de devenir le vrai créateur de ses valeurs.
A n’en pas douter, notre époque est confrontée à ce choix.
Non pas celui qui nous ferait hésiter entre « être religieux » ou
« pas religieux » (1) ; mais nous sommes plutôt à la bifurcation
entre devenir un surhomme ou adorer des idoles.
--------------------------------------
(1) Cf. Malraux et sa prophétie « Le XXIe siècle sera
religieux ou ne sera pas » : quand on voit le résultat, on se dit
qu’il vaudrait mieux qu’il ne le soit pas.
No comments:
Post a Comment