Dissimuler
est le principal moyen de gouverner.
Baltasar Gracian – L'Homme universel ch. XX
Le grand
maître que ce philosophe qui commençait par enseigner à désapprendre !
« Oubliez ce que vous savez » : c’est le premier axiome qu’il débitait
à ses élèves.
Gracian – L’homme universel, ch XX (A
propos d’Antisthène)
Quand on lit
Gracian, on est parfois assommé par la banalité de ses propos : « de
la morale à deux balles ! » se dit-on et puis on passe à autre chose.
Mais il arrive aussi que les circonstances nous invitent à y regarder de plus
près : Gracian a donné des leçons de morale qui ne portent justement que parce qu’on peut les appliquer à la
vie quotidienne.
Et quelle
période plus féconde pour cela que notre actualité faite de propagande électorale,
de discours enflammés où chacun est appelé à avaler le plus d’énormités
possibles, présentées comme frappées au coin du bon sens !
Et pourtant,
si on écoute Gracian, on doit se dire : « Le plus important ce n’est
pas ce qu’on nous dit, mais ce qu’on ne nous dit pas. » Au lieu de réagir
à ces déclarations, demandons nous quels autres propos sont dissimulés
derrière. Car il en va de même en politique que dans l’inconscient des
hommes : les souvenirs sont parfois destinés à en cacher d’autres, comme Freud
l’a expliqué avec les souvenirs écrans. Pour mémoire, il s’agit de souvenirs
venus de la petite enfance, souvenirs très vivaces et pourtant futiles, qui
sont en réalité là pour occulter un souvenir plus essentiel dons la
reviviscence serait douloureuse.
Ainsi de nos
candidats président qui annoncent : « Si je suis élu, je ferai que
tous les chômeurs trouvent un emploi.
Pour cela j’interdirai les licenciements. » Ou alors : « Dès mon
élection je supprimerai 500000 postes de fonctionnaires et je porterai à 39
heures la semaine de travail des autres. »
On se
mobilise contre ou pour ces projets, alors que l’important est ce qu’ils
cachent et non ce qu’ils révèlent. Car au fond, l’enfumage n’est pas dans le
fait de présenter comme positif ce qu’on juge négativement mais dans le fait de
faire croire qu’on a le pouvoir de faire ça.
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