Tuesday, November 21, 2017

Citation du 22 novembre 2017

L’homme n’est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l’ange fait la bête.
Pascal – Pensées (Lire en annexe le passage entier)
L'homme a la conscience d'être Dieu, et il a raison, puisque Dieu est en lui. Il a conscience d'être un cochon et il a également raison parce que le cochon est en lui. Mais il se trompe cruellement quand il prend le cochon pour un Dieu.
Léon Tolstoï - Journal intime
Je reprends cette citation à la « lumière » de l’actualité qui a mis le cochon au centre du quotidien des femmes. La formule ♯balancetonporc paraît ainsi confirmée par Tolstoï : oui l’homme (le mâle – le vir comme disaient les romains) c’est quelqu’un « qui prend le cochon pour Dieu ».
Que faut-il faire alors ? Tolstoï ne nous montre que l’erreur commise et  non le chemin à suivre pour la corriger. Suivons donc Pascal mais laissons de côté sa manipulation cynique lorsqu’il se loue d’avoir l’occasion d’utiliser cette dualité à l’encontre des hommes, et comprenons (à notre façon !) ce qu’il veut dire à la lumière des évènements actuels.
            - D’abord, qu’il ne faudrait pas que les hommes veuillent faire l’ange en renonçant à leur libido. D’ailleurs les femmes elles-mêmes seraient déçues d’avoir pour compagnons des êtres asexués. Et en plus la bête en nous se rebellerait sans doute : voir la débauche dans le clergé pédophile ; ou bien au contraire, cela nous abrutirait : voir les cas d’acédie dans les monastères (1).
            - À l’opposé, faire la bête est chose facile à envisager. Les obsessions sexuelles sont devenues, « grâce » au porno en libre service sur Internet, relativement courantes et pas seulement chez ceux qu’on appelle pudiquement les « libertins ». Faut-il, comme les femmes le disent aujourd’hui, croire que les hommes qui « libèrent » ainsi leur cochon se transforment eux-mêmes en bêtes irrécupérables ? Admettons-le, même si c’est douteux : le débat n’est pas là.
-->  Le débat tient dans cet entre-deux de l’homme mi-ange et mi-bête. Pascal s’en tirait facilement : l’homme est un monstre (= une chimère) incompréhensible.
Admettons : si la libido est une pulsion mystérieuse quand on la voit apparaître chez Freud, l’imagerie médicale nous le révèle : dans le cerveau masculin la zone qui est excitée lors de présentation d’image à caractère sexuel est associée à la zone concernée par la violence. Oui, la sexualité masculine est violente et il n’est que de voir les  accouplements dans la nature pour constater qu’il en va de même ailleurs.


Cliché Gérard David

Mais attention aux conclusions abusives : voici comment les chose se passent vraiment chez les lions : « Même si un (lion) mâle arrive au sommet de la hiérarchie, il ne peut se reproduire avec une femelle qu'avec son consentement. » (lire ici).
Et nous alors ? La civilisation humaine (2) n’a pas cessé d’encadrer et de réglementer les pulsions sexuelles. Je ne dis pas que la morale et la justice y ont toujours trouvé leur compte, mais je dis qu’une idée toute simple s’est peu peu affirmée : dans le cas de la sexualité au moins, entre hommes et femmes, tout est simplement affaire de consentement mutuel.
Quand je dis « simplement », j’exagère un peu : pour corriger il n’est que de lire l’ouvrage prémonitoire de Geneviève Fraisse « Le consentement » publiée en 2007 (3)
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(1) Acédie : il s’agit de la mélancolie doublée de paresse des moines – Lire cette intéressante synthèse.
(2) Je dis « la » civilisation pour englober dans le même effort tout ce que les hommes ont produit depuis leur origine pour vivre ensemble avec ce que la nature leur a donné
(3) On peut lire cet article de Geneviève Fraisse. Ainsi que l’article d’ Anton Perdoncin, « Consentement des femmes et politique. Note sur Du Consentement de Geneviève Fraisse »

Annexe.
« Il est dangereux de trop faire voir à l’homme combien il est égal aux bêtes, sans lui montrer sa grandeur. Il est encore dangereux de lui trop faire voir sa grandeur sans sa bassesse. Il est encore plus dangereux de lui laisser ignorer l’un et l’autre. Mais il est très avantageux de lui représenter l’un et l’autre.
Il ne faut pas que l’homme croie qu’il est égal aux bêtes, ni aux anges, ni qu’il ignore l’un et l’autre, mais qu’il sache l’un et l’autre.
L’homme n’est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l’ange fait la bête.
S’il se vante, je l’abaisse ; s’il s’abaisse, je le vante ; et le contredis toujours, jusqu’à ce qu’il comprenne qu’il est un monstre incompréhensible.
Que l’homme maintenant s’estime à son prix. Qu’il s’aime, car il y a en lui une nature capable du bien ; mais qu’il n’aime pas pour cela les bassesses qui y sont. »

PASCAL, Pensées

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