Il [Socrate] disait que (…) plus réduits étaient ses
besoins, plus il était proche des dieux.
Diogène
Laërce – Vies et doctrines des philosophes illustres (Livre II, § 27)
Consommation
II
Qu’est-ce que vivre ? Je veux dire : qu’est-ce que
c’est que cette existence dont on attend qu’elle soit plus qu’une série de
phénomènes biologiques ? Qu’elle soit plus « bios » que seulement « zoé » ? (1)
Cette question n’est en général pas posée, parce qu’autrefois,
notre société, notre civilisation même la résolvait pour nous. Faire une
carrière admirée de tous, fonder une famille harmonieuse et féconde, jouir d’un
prestige quelconque : voilà ce qui donne à la vie son prix.
Dans le même temps étaient dépréciés les soucis liés à la
sphère des besoins vitaux, ceux du corps qui exigent d’être satisfaits chaque
jour de la même façon, sorte d’absurde roue sans fin.
On aura reconnu l’origine de la caractéristique du
sage : être capable de vivre de si peu que la recherche des moyens de
satisfaire les besoins vitaux se trouve réduite au maximum, laissant à l’étude et
aux exercices spirituels le meilleur du temps.
Seulement voilà : nous sommes à l’opposé de ce genre
d’attitude. Nous sommes prisonniers de la sphère de bios, à satisfaire nos besoins corporels qui n’apportent de
véritable satisfaction qu’au ventre – voire même au bas ventre.
Comment pouvons-nous supporter pareille chose ? Espérer
toute la journée de nous retrouver ainsi à l’heure du repas :
Mais ce n’est pas tout à fait vrai : en allant au-delà
des besoins vitaux, nous n’écoutons que leur variante qui fait du besoin un
désir, du plaisir de leur satisfaction une jouissance : fini le gavage des
porcs : place aux banquets des Dieux ! Raffinons nos repas, faisons
assaut de science dans la gastronomie !
Socrate n’imaginait sans doute pas qu’on puisse mettre du
raffinement dans son assiette. Il n’était qu'un rustre qui ne savait que se
nourrir et rien d’autre. Mais, même à son époque on connaissait déjà tous ces
raffinements et les Dieux de l’Olympe banquetaient joyeusement, ils se gavaient
d’ambroisie et s’enivraient de d’hydromel…
------------------------------------
(1) Les Grecs n’avaient pas un terme unique pour exprimer ce
que nous entendons par le mot vie. Ils utilisaient deux termes sémantiquement
et morphologiquement distincts :
- Zoé ou
zoï (ζωή), qui exprimait le simple fait de vivre commun à tous les êtres animés
(animaux, hommes ou dieux).
- Bios
(βίος) signifiait la forme ou la manière de vivre propre d’un être singulier ou
d’un groupe (vivant, mais indifféremment animé ou non). (Art. Wki)
Pour un développement voir ceci.
Pour un développement voir ceci.
No comments:
Post a Comment