Wednesday, March 16, 2016

Citation du 17 mars 2016

Réapprendre est plus difficile qu'apprendre.
Gracchus Babeuf, fructidor an II, 1794
(A propos Robespierre  moins de deux mois après l’exécution de celui-ci)
(Lire ici des extraits du livre de Jean-Marc Schiappa – Gracchus Babeuf avec les égaux).

Babeuf fait ici son autocritique à propos de son jugement sur Robespierre : « martyre de la liberté » mais aussi « le plus infâme tyran ». Je ne retiendrai toutefois que l’aspect général de cette citation : oui, il est plus difficile de réapprendre que d’apprendre, du moins dans le cas où, pour réapprendre il faut non pas combler un oubli, mais surmonter les forces qui ont fait perdre l’usage de ce que l’on savait. On pourrait dire que réapprendre, c’est « oublier » un oubli. Et c’est cela qui est difficile. Exemples ?
- Par exemple oublier que l’ennemi – l’apostat, l’idolâtre ou le mécréant – est d’abord un homme ou une femme, avec ses angoisses, ses joies et ses peines.
- Ou bien, lorsqu’on revient d’un voyage où tous les parfums de l’aventure se sont conjugués pour nous enivrer, réapprendre les joies de la vie harmonieuse en couple, la joie de l’éternel retour du petit déjeuner ou de l’histoire susurrée sur l’oreiller du tout petit.
Oui, comment revenir sur ces oublis lorsque, agité par les passions de l’excès, on se mesure à des limites qui sont hors de portée des capacités humaines – ce que ressentait sûrement Robespierre lorsqu’il signait les décrets qui, précipitant des hommes et des femmes dans la mort, devaient hisser la République au-dessus de la monarchie et de ses lois corrompues.


Que sont devenus les terroristes d’autrefois, ceux des Brigades rouges, d’Action directe ou de la Bande à Baader ? Ont-ils réappris à vivre sur le mode de tout le monde ? Ou bien restent-ils définitivement enfermés dans leur solitude ? Je crois hélas que la plupart d’entre eux n’a pas pu ou pas voulu se souvenir de leur petite enfance : les terroristes eux aussi ont su ce qu’était la générosité de l’amour, ils ont eux aussi eu une mère qui les a cajolés, qui leur a ouvert son giron et leur a offert la douce sécurité de sa poitrine. C’est avec ça qu’on devrait les rééduquer ; mais aujourd’hui on préfère remplacer tout cela par des cellules de déradicalisation. Attendons de voir ce que ça donne.

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